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des grains de limaille, dans la nature de leurs contacts. L’action de l’étincelle, c’est-à-dire des ondes électriques, a un résultat analogue à celui qu’aurait le tassement ou la compression de la limaille. Les grains s’orientent, s’accolent, se rejoignent, s’ajustent, ainsi que M. Arons l’a constaté par l’examen microscopique.

Cette conductibilité que l’onde électrique a fait naître persiste sans changement sensible, si l’on a soin de ne toucher à rien et de ne point déranger le tube. Mais il y a un moyen infiniment simple de la faire cesser brusquement : il suffit de frapper le tube, de lui appliquer un très léger choc. L’enchevêtrement précédent est détruit du coup. Le tube repasse à sa condition primitive : il redevient isolant. En deux mots l’onde électrique rend conducteur le tube de Branly, le choc le rend isolant.

En 1885 un savant italien, M. Onesti, avait entrevu des modifications de ce genre dans la conductibilité des poudres métalliques sous l’influence d’un extra-courant. Il n’était pas allé plus loin. M. Branly retrouva le phénomène et l’étudia, en lui-même, avec le plus grand soin. Un savant anglais, O. Lodge, bientôt après, comprit le parti que l’on en pouvait tirer pour l’étude des ondulations électriques, à peu près insaisissables jusque-là. M. Marconi, enfin, en profita pour constituer le poste récepteur de son télégraphe.

Ce poste récepteur comprend donc essentiellement un circuit de pile dans lequel est introduit un tube radio-conducteur. L’onde électrique, si atténuée qu’elle soit, augmente assez la conductibilité de la limaille pour qu’un flux très faible puisse passer. Ce point obtenu, un artifice connu permet d’amplifier autant qu’on voudra les effets. Il suffit d’intercaler un petit électro-aimant dans le circuit. Le flux le plus faible peut mettre en action un dispositif de ce genre. Et, d’autre part, le jeu de l’électro-aimant peut servir à fermer un courant énergique, capable à son tour d’actionner toutes les espèces de signaux que l’on voudra : sonnerie, pistolet de Volta, télégraphe Morse, télégraphe enregistreur, et enfin marteau frappeur qui viendra heurter le radio-conducteur lorsque tous ces signaux se seront manifestés et remettra les choses en l’état pour une seconde transmission.

Le problème télégraphique est dès lors résolu, puisque l’on peut recevoir au poste d’arrivée les signaux partis de l’autre station. On peut en régler la durée de manière à constituer par la succession de ces signaux, longs ou brefs, un langage conventionnel comme celui de Morse. On peut aussi donner à l’expérience une forme plus saisissante. C’est l’affaire de combinaisons qui sont un jeu pour un constructeur