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places de sûreté, d’une indication générale et d’une promesse verbale de La Rochefoucauld. Le traité d’Angoulême proprement dit, c’est-à-dire l’acte qui fut signé le 12 mai, ne contenait, à ce sujet, qu’une vague allusion : « Le Roi accorde à la Reine sa mère qu’Elle dispose de sa maison ainsi qu’il lui plaira, appelant et retenant à son service telle personne qu’Elle voudra. » Tout le reste du traité était consacré à confirmer la situation antérieure de la Reine-Mère, au point de vue des charges, des pensions, et à accorder une abolition de ce qui s’était passé depuis le départ de Blois tant à elle qu’à ses serviteurs, y compris le duc d’Epernon. Des places de sûreté, pas un mot. Marie de Médicis, s’en tenant aux paroles de La Rochefoucauld, avait déclaré qu’elle n’aspirait « à d’autre sûreté que le cœur de son fils. »

La Reine, en signant ce traité incomplet et en brusquant la proclamation de la paix, n’avait eu d’autre objectif que d’interrompre la campagne de Schomberg. Elle avait obtenu ce résultat. Mais elle n’entendait nullement renoncer aux promesses qu’on lui avait faites. En revanche, Luynes, tenant la signature de la Reine, traînait, à son tour, les choses en longueur. Il cherchait, visiblement, quelque moyen d’échapper à l’engagement pris par La Rochefoucauld, par Béthune et par Bérulle au nom du Roi, en ce qui concernait les places de sûreté.

Ainsi se prolongea, pendant plusieurs semaines, une négociation des plus complexes et des plus pénibles, pleine de reproches et d’aigreurs réciproques, et qui n’était que la suite du malentendu d’Angoulême. Les deux camps jouaient au plus fin autour des deux questions qui formaient, pour ainsi dire, la contre-partie l’une de l’autre : rapprochement effectif du Roi et de la Reine, désignation des places de sûreté.

Richelieu consentait au rapprochement ; mais il voulait les places. Il consentait au rapprochement pour un temps ; mais il voulait les places pour toujours. Il lui plaisait que la Reine ne fût plus traitée en ennemie, parce qu’il avait besoin de la Cour. Mais il ne lui plaisait pas qu’elle se fixât à la Cour, parce qu’il savait bien que Luynes ne cesserait pas de le traiter en adversaire.

On finit par s’accorder sur le texte des propositions primitives. Le 11 juin, Marie de Médicis reçut un brevet royal lui remettant la disposition des gouvernemens d’Angers, de Chinon, des Ponts-de-Cé. La négociation se trouvait ainsi définitivement conclue.

Richelieu pouvait s’en montrer satisfait. Dans l’entourage de