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fut point la faute des circonstances, mais de son peu d’ambition et de sa modestie.

Né à Baugé (Maine-et-Loire) le 13 février 1773, Louis-Guillaume Papin avait à peine terminé ses études au collège de la Flèche, qu’il présidait à Angers le club de l’Ouest. C’est dire qu’il avait pris la tête du mouvement révolutionnaire. Il poussa même le zèle jusqu’à écrire aux Affiches, lors du procès de Louis XVI, qu’il abjurait le nom de Louis pour prendre celui d’« un homme dont les vertus privées et publiques étaient l’objet de son admiration, le tendre, l’éloquent Cerutti. » Et quand éclata la guerre de Vendée, il suivit les armées de la République en qualité de capitaine quartier-maître. Mais les excès des proconsuls Francastel et Carrier, en révoltant sa conscience d’honnête homme, le dégoûtèrent à tout jamais de la politique qu’ils représentaient. Envoyé à Paris, en 1794, par le département de Maine-et-Loire pour suivre les cours de l’Ecole normale, il fut nommé à son retour professeur d’histoire à l’Ecole centrale d’Angers. Nous avons son discours d’ouverture et celui qu’il prononça le 10 prairial, an IV, à la fête de l’Agriculture : ils respirent l’un et l’autre une grande sagesse et un patriotisme exempt de l’emphase du temps. Mais le coup d’éclat qui acheva de l’illustrer fut un drame en deux actes et en prose qu’il fit représenter à cette époque sous le titre : Les détenus au calvaire d’Angers ou la générosité récompensée par l’amour[1]. Cette pièce de circonstance où Papin, dans une langue enflammée, ne craignait pas de mettre en scène, sous des masques transparens, les bourreaux et les victimes de la Terreur, obtint un succès considérable que la réaction thermidorienne lui fit payer plus tard de la perte de sa place et, peu s’en fallut, de sa liberté. Il fut obligé de se terrer pendant quelque temps et se réfugia chez son ami Grille, au Hutereau, près d’Angers, où il employa ses loisirs « à cultiver les Muses. »

Vint le Consulat. Après avoir occupé la chaire de législation politique à l’Ecole centrale de la Corrèze, il revint en Anjou et fut nommé, en l’an VIII, secrétaire particulier du préfet Désilles, puis, en l’an X, chef de la première division de la préfecture de Maine-et-Loire. Mais l’enseignement public ne cessait de l’attirer, et il n’attendait qu’une occasion pour rentrer dans sa carrière

  1. 1 vol. in-8o de 64 pages, chez Mame frères.