Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 156.djvu/211

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

subvenir à cette évaporation formidable, si l’absorption est trop faible pour compenser la transpiration, les tiges s’inclinent, les feuilles pendent ou s’aplatissent sur le sol, elles perdent leur turgescence, se fanent et cessent tout travail ; le quart, le tiers, parfois la moitié de la journée sont perdus. Sans doute, quand le soleil est descendu au-dessous de l’horizon, que la nuit est venue, l’évaporation cesse, tandis que la racine au contraire continue de puiser dans le sol ; peu à peu la plante répare ses pertes, et quand le jour paraît, les feuilles fanées la veille ont repris leur rigidité, mais le mal n’est ainsi que partiellement réparé, car, on ne saurait trop le répéter, pendant tout le temps qu’elles restent languissantes, les feuilles n’assimilent plus, leur activité est suspendue, et par suite, le poids de matière végétale élaborée d’autant plus diminué que la fenaison a duré plus longtemps.

En outre, pour que la turgescence reparaisse pendant la nuit, il faut, d’une part, que la dessiccation des organes feuillus n’ait pas été complète, de l’autre, que le sol soit encore humide.

Si la chaleur est excessive, que la sécheresse de l’air soit presque complète, ainsi qu’il arrive dans notre Afrique quand souffle le sirocco, le vent embrasé du désert, rien ne résiste ; les feuilles jaunissent et meurent, et en quelques jours est anéantie une récolte qui s’annonçait brillante. En France même, notre production de blé est parfois diminuée quand se succèdent en juillet des journées chaudes et éclatantes qui déterminent une dessiccation trop rapide et par suite une maturation trop hâtive.

L’équilibre entre la transpiration et l’absorption a d’autant plus de chances de n’être pas rompu que la terre est plus humide, qu’elle conserve un plus fort approvisionnement d’eau ; cet approvisionnement n’est assuré que dans une terre poreuse dont les particules laissent entre elles des espaces vides où l’eau peut se loger. Or, nous avons vu, dans un article précédent[1], que cette porosité est constamment détruite par les pluies prolongées, et que le travail incessant du cultivateur a précisément pour but de la rétablir.

Quand le travail a été bien exécuté et que la terre est de bonne qualité, elle nous apparaît comme un agrégat de petites particules qui ne se touchent que par quelques points. Un lot de terre meuble est grossièrement comparable à une masse de grains de plomb. Si on remplit de ces grains de plomb un vase d’un litre,

  1. Voir la Revue du 15 février 1899.