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l’imbibition, bientôt celle-ci est complète, et l’eau s’écoule limpide par l’orifice inférieur ; si on l’examine, cependant, à l’aide d’un réactif approprié, on reconnaît qu’elle a soustrait à la terre un de ses élémens : cette eau d’égouttement renferme du carbonate de chaux dissous à l’aide de l’acide carbonique formé par la combustion de l’humus.

La pesée du cylindre montre qu’une partie de l’eau déversée en pluie a été retenue par la terre ; supposons, pour fixer les idées, que les 100 grammes de terre aient absorbé 25 centimètres cubes d’eau ; remettons l’allonge en place pour la soumettre à une seconde averse, puis à une troisième, et, si nous pesons chaque fois, nous trouvons que la terre ne gagne plus rien, toute l’eau déversée s’écoule ; elle s’écoule cependant de plus en plus lentement à mesure que la pluie se prolonge ; bientôt, elle forme au-dessus de la terre une couche qui ne s’infiltre que lentement ; enfin, au lieu d’apparaître limpide comme au début, l’eau qui traverse est limoneuse.

En outre, la surface de la terre a complètement changé d’aspect, elle est recouverte maintenant d’une boue continue et imperméable, et chose curieuse, si nous pesons notre appareil, après qu’il a reçu ces nombreuses averses, nous constatons avec étonnement que la proportion d’eau que retient la terre a diminué ; au lieu de 25 grammes, nous n’en trouvons plus que 20 ; si nous avons au début marqué la hauteur qu’atteignait, dans le cylindre, la terre sèche, nous voyons que ces pluies prolongées l’ont tassée, elle s’est effondrée ; toute la structure poreuse a disparu, l’argile, devenue miscible à l’eau par le départ du calcaire, a été entraînée, elle abouché les pores, les canaux d’écoulement ; les espaces vides sont remplis, la terre a diminué de volume, et la contraction qu’elle a subie a chassé l’eau comme le fait la main qui comprime une éponge. Ainsi, sous l’influence de la pluie prolongée, la terre s’est desséchée[1] ; loin de gagner de l’eau, elle en a perdu, son approvisionnement a baissé et ne peut se rétablir ; en effet quand la pluie tombe sur la couche de boue qui forme la surface de notre terre d’expérience, elle ne s’infiltre plus, elle séjourne ; elle ne couvre la terre que parce qu’elle est retenue par la paroi de verre ; sur une terre en place, elle glisserait si la pièce était en pente, entraînant avec elle la boue ; la composition du sol change ;

  1. J’ai donné d’autres exemples de ce fait inattendu dans l’article sur le Travail du sol ; 15 février 1899, p. 907.