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triompher l’esprit révolutionnaire. Elle incitait donc aussitôt les puissances alliées à s’unir à elle pour rétablir dans les États napolitains l’autorité du roi. Au refus de l’Angleterre, qui, quoique pour d’autres causes, ne voulait pas plus intervenir à Naples qu’à Madrid, et au refus de la France, qui craignait de se donner l’air de travailler au relèvement d’un pouvoir absolu, l’Autriche, à l’improviste, se rapprochait de la Russie. Quoiqu’en ces derniers temps, leurs relations se fussent refroidies, elle ouvrait avec elle les négociations qui préparèrent le congrès de Laybach et aboutirent au rétablissement de Ferdinand Ier dans la plénitude de son pouvoir.

À ce moment, la différence de vues, qui existait sur ces questions entre l’Angleterre et la France d’un côté, et l’Autriche de l’autre, ouvrait matière à de longues et délicates conférences entre l’ambassadeur français à Londres et les ministres anglais, conférences qui s’alimentaient de divers autres objets tels que les troubles du Portugal où se devinait la main des révolutionnaires espagnols, qui rêvaient, disait-on, d’annexer ce pays à l’Espagne, ou encore la suspension des pourparlers engagés entre l’Espagne et les États-Unis en vue de la cession des Florides par la première de ces puissances à la seconde, — suspension à laquelle avait applaudi l’Angleterre et qui faisait craindre qu’elle ne voulût mettre la main sur ces territoires avant que les Américains les eussent achetés.

Dans cette suite d’affaires grossies à tout instant d’incidens inattendus, comme, par exemple, les tentatives des bonapartistes pour délivrer le captif de Sainte-Hélène, il y avait de quoi remplir l’existence de l’ambassadeur de France et défrayer les rapports que, toutes les semaines, il adressait à sa Cour. Mais elles marchaient avec lenteur, ces affaires. Si graves qu’elles fussent, les négociations auxquelles elles donnaient lieu, tant d’entretiens démesurément longs durant lesquels le plus souvent on parlait beaucoup de part et d’autre pour ne rien dire et sans rien décider, étaient fréquemment interrompues par les difficultés que rencontraient chaque jour sur leur chemin les ministres anglais, en raison de la situation intérieure du royaume.

L’Angleterre, on l’a vu, traversait une crise aiguë. Le procès de la reine occupait tous les esprits et envenimait l’antagonisme des partis. Il mettait, à tout instant, les citoyens aux prises. La majorité de la Chambre des communes s’était prononcée contre