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ses penchans sympathiques, sa passion contagieuse, son esprit de prosélytisme, son idéalisme philanthropique, son absence de sens politique ; son amour des abstractions, sa logique illogique ; sa nature diffusive, expansive, communicative, son goût de mettre en commun idées et sentimens, comme si ce que chacun garde était perdu pour lui et pour les autres ; son amour de l’égalité, qui exclut le respect hiérarchique en laissant subsister la fraternité et en refrénant l’originalité individuelle ; son « humanitairerie, » que Gioberti raillait si amèrement, enfin et en un mot, sa foncière sociabilité ! A la concentration en soi, à la circonspection, à la réserve du vrai Latin peut-on assimiler notre imprudence, notre étourderie gauloise, notre nature ouverte et sans détour, qui se laisse duper à toutes les protestations d’amitié, et prend les belles paroles pour argent comptant ? Si l’Italien est ami des moyens termes et des accommodemens, s’il a le génie des compromis, s’il rivalise sous ce rapport avec l’Anglais, peut-on en dire autant du Français mathématicien en toutes choses, dialecticien par plaisir de pousser les raisonnemens jusqu’à ce bout où ils choquent la raison, radical, intransigeant, qui veut tout ou rien ? Au peuple italien trop souvent sceptique, qui respecte les faits et d’ordinaire ne respecte que les faits, comparez notre foi aux idées, notre crédulité aux systèmes, notre oubli fréquent des réalités, notre fonds d’enthousiasme mal contenu par les dures leçons de l’expérience. Il est clair que qualités et défauts instinctifs diffèrent profondément en deçà et au-delà des Alpes, comme aussi des Pyrénées. On peut même dire que les qualités natives des diverses nations sont ici complémentaires. Comment donc le psychologue pourrait-il les réunir sous une même appellation et sous une commune appréciation ?


III

Un des principaux thèmes à déclamation contre les races latines est leur « infériorité religieuse. » Pour soutenir cette nouvelle thèse, on commence par faire du catholicisme une sorte de propriété commune des Néo-Latins. Les catholiques de Belgique, et ceux de Cologne, d’Aix-la-Chapelle et des bords du Rhin, ceux de la Bavière et de l’Autriche, enfin ceux de New-York et des Etats-Unis sont-ils donc des Néo-Latins ? Se ressemblent-ils entre eux et ressemblent-ils aux catholiques de Naples, de Séville ou