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CÔTES ET PORTS FRANÇAIS DE L’OCÉAN

ciels, aménagé aussi bien que possible l’ancien port des pêcheurs et l’anse du port vieux. Les rochers isolés ont été soudés les uns aux autres. Un troisième bassin, le port neuf, a été construit entre les deux premiers, faisant saillie à l’extrémité du promontoire, projetant en mer deux jetées qui s’encastrent à toutes les roches saillantes et se recourbent, par une série d’articulations, comme les pinces d’un crabe gigantesque. Toutes ces constructions factices, dont les chantiers avaient nécessité, à travers le pittoresque rocher de l’Atalaye, la perforation de tunnels, présentant l’aspect de véritables décors de théâtre, font sans doute grand honneur au progrès de nos travaux hydrauliques. La mise en œuvre et l’échouage de ces blocs cyclopéens ont pendant plusieurs années servi de divertissement aux oisifs et captivé même l’attention des souverains qui avaient fait de Biarritz, pendant l’été, un séjour de plaisance. Mais les résultats pratiques n’ont pas été en rapport avec les sacrifices.

Il est juste, cependant, de reconnaître que la digue du port neuf ne sert pas seulement de promenade aux baigneurs ; elle protège, du côté où les lames sont le plus agressives, le massif de l’Atalaye, dont les falaises, profondément excavées, sont secouées par des bouillonnemens et des trépidations qui mettent en branle toutes les maisons situées sur le plateau. L’industrie de la pêche s’est aussi développée d’une manière sensible à la faveur des travaux exécutés, qui donnent, somme toute, à la marine locale un meilleur abri. Trois bateaux faisant la pêche au chalut, une trentaine de grandes barques et près de trois cents hommes d’équipage constituent la population maritime active de Biarritz ; mais le mouvement commercial y est à peu près nul.

En revanche, les deux plages qui s’étendent du côté de l’Atalaye sont parmi les plus belles de l’Océan. Biarritz en possède même trois, ayant chacune leur physionomie distincte : celle qui se trouve à l’Ouest de la ville, au pied de son rocher, au fond de la petite anse du port vieux où le flot vient mourir, et que les bateaux des pêcheurs ont depuis quelque temps tout à fait abandonnée ; au Sud, la magnifique plage des Basques, bordée de hautes falaises contre lesquelles la mer déferle avec violence. La première est particulièrement recherchée par les faibles et les timides ; la seconde est celle des aguerris et des marins. La troisième est la « grande plage, » la plage mondaine, et c’est elle qui fait depuis près de quarante ans la fortune du pays. Elle se développe sui-