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résolution de Charles X et n’imputât à lui seul la responsabilité du désastre où la royauté avait péri, et ils s’exprimèrent sur ce point d’autant plus nettement que, craignant le malheur, ils avaient fait de vains efforts pour le prévenir. Depuis la formation, déjà de très mauvais augure, du ministère du prince de Polignac, mais surtout depuis qu’à la suite du conflit engagé entre la couronne et le parlement, une dissolution avait eu lieu, amenant de nouvelles élections dont l’issue n’était pas douteuse, des bruits de coups d’Etat étaient répandus dans l’air, d’autant plus accrédités qu’une presse royaliste ardente ne se cachait plus d’appeler cet acte de force de ses vœux et de ses espérances. C’était alors à qui, parmi les chefs des divers cabinets, prodiguerait au vieux roi, avec le plus d’instance, des avertissemens et même des injonctions suppliantes pour le détourner de se jeter par un coup de tête en dehors des voies constitutionnelles : « Je conçois vos difficultés, disait le prince de Metternich, mais un coup d’Etat perdrait la dynastie. » — « Prévenez bien le Roi, disait l’empereur Nicolas au duc de Mortemart, quittant son ambassade de Pétersbourg pour retourner à Paris, qu’aucun traité ne nous obligerait à aider les Bourbons dans une si périlleuse entreprise. » À ces avis répétés, Charles X répondait avec une sérénité imperturbable qu’on le soupçonnait à tort d’une intention pareille, soit que, jugeant le secret important pour ses desseins, il crût pouvoir se permettre toutes les précautions nécessaires pour le conserver, soit, ce qu’on aime mieux à penser, que, par une interprétation subtile et forcée d’un article de la Charte, il mît sa conscience à l’aise sur le tort qu’il faisait à la vérité.

Ces dénégations répétées donnèrent même lieu à un incident, en apparence insignifiant, mais qui fit faire dès le premier jour à la situation un pas sur lequel il était difficile de revenir. Les ambassadeurs et les autres membres du corps diplomatique, recevant ces assurances de la bouche du souverain lui-même ou du premier ministre, et n’y entendant pas malice, avaient conçu, dans les derniers jours, une sécurité au moins relative, que leurs dépêches avaient dû tâcher de faire partager à leurs Cours. Aussi, grande fut leur surprise, lorsqu’en ouvrant le Moniteur du 25 juillet 1830, ils virent l’audacieux défi lancé, à leur insu, et leur dépit ne fut pas moindre, car rien n’est plus désobligeant que de n’avoir rien su pour les gens dont le métier est de tout savoir. Plus grande encore fut leur irritation de ne recevoir, ni le jour même, ni les