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de la Gironde, fait face à l’îlot de Cordouan et est bordé de falaises calcaires que les vagues sapent sans cesse, qu’elles ont souvent perforées et renversées, aujourd’hui noyées et dérasées au-dessous du niveau des basses mers. Ce qui en reste forme une longue série de bancs sous-marins, horizontaux, de « platins, » qui seraient de redoutables écueils, si l’embouchure du fleuve n’était pas admirablement balisée et éclairée. Le côté Ouest, qui regarde directement l’Océan, est bordé d’un appareil de dunes en tout semblables à celles de Gascogne. Le côté Nord longe la Seudre et présente une succession ininterrompue de bas-fonds, de parcs à huîtres, et de marais salans.

Le profond sillon tracé par le grand estuaire girondin n’interrompt pas la chaîne continue de dunes, qui commence à l’embouchure de l’Adour, suit toute la côte des Landes et atteint la pointe de Grave. Jusqu’à la Loire et même au-delà, on retrouve, de distance en distance, la même formation de petites collines de sable, entrecoupées de bas-fonds, de fondrières, de marais, presque tous autrefois exploités pour le sel, aujourd’hui en partie délaissés, en partie cultivés, transformés en pâturages et en réservoirs où l’on engraisse de savoureux coquillages.

La côte d’Arvert présente une superficie de près d’une centaine de kilomètres carrés en nature de dunes jadis errantes, fixées depuis un siècle à peine, converties en magnifiques forêts, desservies par un chemin de fer d’exploitation, mais dont les divagations ont fait pendant longtemps la désolation de toute la contrée. Plus encore peut-être que celles des Landes et de la Gironde, les dunes de la côte de Saintonge étaient animées d’une effrayante mobilité. « Les montagnes marchent en Arvert, » disait avec raison un ancien proverbe ; et cette marche était d’autant plus rapide que le sable qui constitue ces dunes contient une très grande quantité de débris de coquillages et de carbonate de chaux. Leur hauteur est peut-être inférieure à celle des dunes landaises ; elles ne dépassent pas en général une cinquantaine de mètres. Mais l’histoire des désastres qu’elles ont occasionnés est aussi lamentable ; et leur vitesse moyenne de progression était même bien supérieure, quelquefois 40 et 50 mètres par an. Depuis que la hache du bûcheron, les incendies et la dent meurtrière des troupeaux ont détruit les anciennes forêts et jusqu’aux taillis qui recouvraient autrefois d’une verte ceinture tout l’appareil littoral, les énormes taupinières de sable mises à