Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 157.djvu/776

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

jours et compléter d’une façon très suffisante l’armement de toutes les batteries de nos ports de mer.

Nous ne voulons pas dire que nos batteries de côte réalisent, ni dans l’ensemble, ni dans les détails, ce qu’on aurait pu avoir, avec beaucoup moins de temps et de dépenses, s’il y avait eu unité et activité dans les études et les travaux poursuivis depuis une trentaine d’années. Nous répétons ici ce que nous disions à l’amiral Krantz, en 1889, ce que nous avons dit devant la Commission présidée par le général de Miribel, au sujet des armées coloniales. On peut constater, sur ces points et particulièrement en ce qui concerne les troupes de la marine, les conséquences de l’organisation méthodique de l’impuissance et du désordre, inhérente au régime parlementaire tel qu’il est pratiqué chez nous depuis une vingtaine d’années particulièrement.

Dans le cas d’une guerre à la fois maritime et continentale, les garnisons d’artillerie de nos ports seraient évidemment tout à fait insuffisantes, et par suite l’état de choses présent ne saurait être maintenu en principe. Mais, pour le cas particulier d’une guerre avec l’Angleterre, il y avait, nous le répétons, surabondance de ressources rapidement disponibles et transportables partout où besoin en était. Comment a-t-on pu penser que l’Angleterre était en mesure de s’emparer du Cotentin ou de prendre pied à l’île d’Ouessant, sur nos côtes de Bretagne, en Tunisie, en Algérie, en Corse, de s’emparer de Madagascar ou de l’Indo-Chine, alors que, sur tous ces points, les forces militaires, dont dispose la France, sont en mesure de lutter avec tout ce que l’Angleterre aurait pu y expédier sans dégarnir ses colonies, l’Inde, l’Egypte et la Grande-Bretagne ? On voit aujourd’hui, par ce qui se passe au Transvaal, une preuve palpable de l’impuissance sur terre d’une nation, dont toutes les forces sont absorbées par le commerce, l’industrie et l’occupation, même superficielle, d’un immense empire colonial. Des débats du Parlement anglais, il résulte que, si l’Angleterre a une flotte numériquement et nominalement colossale, elle n’a pas assez de matelots pour en assurer le service. Comment a-t-on pu penser que cette même nation viendrait attaquer sur terre une puissance disposant d’un million de soldats ?

Au cours de l’inspection que nous avons passée nous-même, à la fin de novembre 1898, nous n’avons pas cessé de le répéter : si un amiral anglais pouvait avoir l’idée folle de pénétrer dans