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Hanovre, la Hesse et la Saxe. Nous tracerons une ligne de démarcation entre l’Allemagne du Nord et celle du Sud et derrière cette ligne nous prendrons position. Nous pouvons faire encore la guerre sans recourir à l’emprunt ; le trésor est plein et quand nous aurons besoin d’argent, le pays nous en donnera. Si la Chambre nous en refuse, si sa haine contre le cabinet fait taire son patriotisme, ce sera un excellent prétexte pour la dissoudre. Nous demanderons alors 300 millions de francs aux diètes provinciales ou à celles des cercles. Nous sommes donc préparés à faire la guerre à l’Autriche ; mais pas à l’Autriche et à la France. Aussi donnerai-je pour instructions à M. de Goltz de demander officiellement au gouvernement de l’Empereur comment il envisage les éventualités que je prévois ; en un mot, ce qu’il fera si cela chauffe en Allemagne. — Si cela chauffe, il nous sera difficile de rester froids. »

Ainsi il dépendait absolument de Napoléon III de mettre aux mains la Prusse et l’Autriche et de faire éclater en 1863 la guerre intestine allemande de 1866.

Loin d’exciter à la rupture, il fit tomber de Paris une douche d’eau froide sur la surexcitation de Bismarck. Drouyn de Lhuys écrivit à Talleyrand : « Vous savez que Sa Majesté s’est imposé la loi de ne point intervenir dans les affaires de l’Allemagne et de s’abstenir de toute démarche qui porterait atteinte ou même seulement ombrage à l’indépendance des souverains et des peuples de ce pays. Aussi, dans l’état actuel des choses, tant que le conflit ne sortira pas du cercle des intérêts locaux, des prétentions particulières et des rivalités intérieures, la volonté de l’Empereur est d’en demeurer spectateur, non pas indifférent, mais impartial. Or cette attitude serait inconciliable avec l’expression d’un jugement prématuré sur l’origine, la nature ou la solution probable des questions qui sont maintenant k l’ordre du jour devant la Diète. Si par la force H os choses, la destruction de l’ancienne organisation germanique devenait un fait irrévocablement accompli, comme l’équilibre entre les forces des diverses puissances pourrait s’en trouver gravement affecté, l’Empereur rechercherait alors la combinaison qui offrirait le plus de garanties à la sécurité de ses États et à la paix de l’Europe (25 décembre 1862). »

Bismarck exprima, d’un ton chagrin, la déception que lui apportait cette fin de non-recevoir. « Mes conversations avec l’Empereur, dit-il, m’avaient fait espérer dans une certaine mesure