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legibus connubialibus. On ne peut s’empêcher, sur ce titre, de songer à l’immortelle consultation de Panurge sur le mariage. C’est aussi dans cette même année, 1524, que Rabelais, pour en finir avec les vexations des Franciscains, demande à changer d’ordre, et l’obtient. Il passe des Franciscains aux Bénédictins de Maillezais, sous la discipline intelligente et libérale d’un sien ami, Geoffroy d’Estissac, évêque du lieu. Ce temps n’a pas été sans doute le moins heureux, ni, grâce à l’entière tranquillité dont il semble avoir joui six ans, le moins bien employé de sa vie vagabonde.

Comment et pourquoi le retrouvons-nous en 1530 à Montpellier, où il prend sa première inscription d’étudiant en médecine ? On remarquera que, s’il était né en 1483, il aurait donc eu 47 ans alors, ce qui est un peu tard pour commencer l’étude de la médecine, et surtout quand il semble qu’on n’y cherche, comme lui, qu’un moyen de gagner sa vie. Il fera bientôt étalage de sa science toute neuve, et nous le verrons insérer dans son roman des chapitres entiers de matière médicale, ainsi sur « les vertus de l’herbe appelée Pantagruélion, » laquelle n’est autre que le chanvre. Mais ce n’est pas l’universelle curiosité, la soif inapaisée de connaître qui l’ont dirigé vers la médecine ; ce sont les nécessités de la vie. La preuve en est qu’à peine bachelier, il se transporte à Lyon, où on lui confie, pour le gage annuel de quarante livres tournois, les fonctions de médecin de l’Hôtel-Dieu. Il remplit, en même temps, chez l’imprimeur S. Gryphius, un emploi de correcteur, et sans parler de ses Almanachs, c’est de ce temps que datent ses premières publications. En voici la liste : Epistolarum medicinalium J. Mainardi, Ferrariensis medici, tomus secundus, avec dédicace à son ami de Fontenay, le jurisconsulte Tiraqueau ; — Hippocratis ac Galeni libri aliquot, avec dédicace à Geoffroy d’Estissac ; — Ex reliquiis venerandæ antiquitatis Lucii Cuspidii testamentum, avec une dédicace à Aymery Bouchard. Toutes ces publications sont datées de 1532. De la même année date encore l’apparition des Grandes et Inestimables chronicques du grand et énorme géant Gargantua, qu’il ne faut pas confondre avec le Gargantua de Rabelais lui-même, lequel ne verra le jour qu’environ trois ans plus tard. Et, enfin, c’est également, en 1532, que paraît à Lyon, chez François Juste, le « premier livre » de Pantagruel, roi des Dipsodes, restitué à son naturel, avec ses faits et prouesses épouvantables, composé