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Les États s’imposent à cet égard de lourds sacrifices. Ils y sont largement aidés par les contributions des gens en place que la défaite de leur parti rendrait à la vie privée ou, dans le camp opposé, par ceux qui aspirent à leur succéder. De véritables taxes étaient autrefois régulièrement prélevées à cet effet sur les fonctionnaires dont l’existence officielle dépendait de l’issue de la campagne. En février 1870, une loi spéciale a été votée en vue de mettre fin à ces emprunts forcés. Elle est restée à peu près lettre morte. Lors de la création du service civil[1] l’administration fédérale l’a complétée par des règlemens dont la stricte précision ne semblerait devoir laisser place à aucune échappatoire. Le civil service act du 16 janvier 1883 renferme, en effet, un paragraphe ainsi conçu : « Les sénateurs, les députés, les délégués des territoires au Congrès, les délégués électoraux, les officiers ou employés des deux Chambres, les officiers relevant du pouvoir exécutif, judiciaire, militaire ou naval, les clercs ou employés des départemens ministériels ou de tout bureau rattaché au service exécutif, judiciaire, militaire ou naval des États-Unis, ne pourront ni directement, ni indirectement solliciter ou recevoir aucune souscription ou contribution pour un objet de propagande politique quelconque d’un fonctionnaire, clerc ou employé d’un département ministériel ou d’un bureau s’y rattachant ni d’aucune personne recevant un salaire provenant des fonds du Trésor des États-Unis. »

Les fonctionnaires fédéraux ont d’autre part été invités par l’administration centrale à signaler les tentatives de pression qui pourraient être exercées contre eux. Toutes les précautions semblent donc prises pour empêcher de tourner une loi dont la violation expose d’ailleurs les délinquans à une amende de 5 000 dollars et d’un emprisonnement qui peut aller jusqu’à trois ans. Ces prescriptions se heurtent malheureusement à des coutumes invétérées, contre lesquelles il est plus facile de légiférer que de sévir. Les renseignemens suivans que donnait récemment le New York Herald[2] ne permettent guère en tous cas de croire sur ce point à l’efficacité des circulaires administratives.

  1. Le service civil, institué en 1883, a eu pour objet d’obvier aux inconvéniens résultant du remaniement complet du personnel administratif à chaque changement de présidence. Sans conférer précisément l’inamovibilité à ceux qui en font partie, il les garantit contre des destitutions arbitraires. Son action protectrice s’étend à près de 75 000 fonctionnaires.
  2. Numéro du 23 juillet 1900.