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leur curiosité, mais qu’ils ignorent encore plus qu’auparavant. Toutefois les Jésuites ont à Zi-ka-wei un muséum et un observatoire qui reçoivent parfois la visite des mandarins ; ils ont aussi fondé un journal illustré qui expose et discute les choses d’Europe ; lu par un certain nombre d’indigènes, il est loin d’avoir la même popularité que les publications analogues trouvent au Japon. C’est eu commençant par la jeunesse que l’on tente de transformer l’esprit chinois. Des écoles ont été fondées et sont entretenues en partie par les missions, en partie grâce à des subventions reçues du gouvernement français, des municipalités françaises de Chine : elles sont ouvertes aux enfans sans distinction de religion, et il en est où les chrétiens sont moins nombreux que les autres. La rétribution demandée est faible ; la gratuité est accordée, s’il y a lieu. La propagande religieuse en est absente ; les missions espèrent que l’habitude des idées européennes préparera naturellement les esprits à la religion d’Occident ; cette discrétion est récompensée par le succès des établissemens. Une solide instruction élémentaire est donnée, portant principalement sur les sciences exactes, la géographie, la morale, le français qui sert de véhicule à l’enseignement ; on n’a garde de négliger le chinois, les enfans étudient les classiques sous des maîtres indigènes, de manière à pouvoir, s’ils le veulent, se préparer ensuite aux examens. Depuis une quinzaine d’années, plusieurs de ces institutions ont été fondées, à Péking, Tien-tsin, Chang-hai, Canton, etc., par les Lazaristes, par les Jésuites, par les Missions étrangères avec l’aide des Frères maristes ; mais l’argent n’abonde pas, et l’on ne peut faire tout ce que l’on voudrait. C’est là une œuvre toute française, de la plus grande importance pour l’avenir de notre influence en Chine, et qui mériterait tous les encouragemens.

Des résultats sérieux ont été obtenus ; les élèves ont été placés dans les consulats, dans les postes, dans les télégraphes, chez les commerçans et ingénieurs européens, dans les chemins de fer ; on n’en a pu fournir autant qu’il en était demandé ; après la crise actuelle, limitée d’ailleurs au Nord, il y aura des ruines à relever, il faudra encore de l’argent et des dévouemens ; mais, si l’Europe et la France savent jouer leur rôle, les écoles devront prendre un nouvel essor. L’intérêt n’en est pas de fournir des moyens d’existence à des Chinois, mais de créer un noyau de jeunes gens intelligens, une élite (cette instruction mi-européenne ne pourra jamais s’adresser sous cette forme à la masse) capable