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résulterait pour la France d’obtenir ce succès dû à la bienveillance du Souverain Pontife pour elle. Je montrai la satisfaction qu’en ressentirait l’épiscopat, et qui serait un élément de pacification religieuse. Au point de vue extérieur, la France pourrait faire comprendre à l’Europe que ses institutions actuelles n’étaient pas un obstacle à une parfaite entente avec le Saint-Siège. Elle obtiendrait un succès, constaté par un chiffre positif, que lui envieraient, et nous en eûmes bientôt la preuve, ceux-là mêmes qui, au dehors, pourraient chercher à l’amoindrir.

Quelques jours après, je reçus la réponse du gouvernement. M. Waddington, dans un télégramme du 21 décembre, me disait « que le gouvernement avait examiné avec toute l’attention qu’elles méritaient les ouvertures confidentielles qui m’avaient été faites pour la prochaine promotion de cardinaux. Nous sommes disposés à présenter l’évêque de Poitiers au Saint-Père, si Sa Sainteté consent à nommer avec lui Mgr l’Archevêque de… Nous attacherions cependant beaucoup de prix à ce que le Saint-Père ne maintînt pas sa réserve, en ce qui concerne le septième chapeau, et nous aimerions à espérer qu’il nous donnerait ce gage de sa bienveillance pour la France, sans y mettre aucune condition restrictive. »

Cette réponse nous plaça dans l’embarras, car le nom du candidat que proposait le gouvernement ne fut pas agréé par le Saint-Père. Il en fut de même d’un second qui, à son défaut, me fut envoyé de Paris quelques jours après et que je ne dirai pas davantage. La négociation prenait une tournure délicate, car elle allait se compliquer d’une question doctrinale sur laquelle Rome était bien décidée à ne pas céder. Les ministres des Cultes et des Affaires étrangères avaient eu, en effet, la pensée de donner comme contrepoids à la nomination de Mgr Pie, deux archevêques qui avaient été dans la minorité du Concile et contraires à la définition de l’infaillibilité pontificale.

« Pour l’œuvre de conciliation et d’apaisement, me télégraphiait le 23 décembre M. Waddington, que le Saint-Siège poursuit, non moins que le gouvernement, il semblerait préférable de choisir le second cardinal parmi les archevêques ou évêques n’appartenant pas à la même nuance doctrinale que l’évêque de Poitiers. » Or, c’était précisément ce que le Saint-Siège ne voulait à aucun prix. Le vote du dogme de l’infaillibilité par le Concile et la soumission de tous les évêques