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n’agréât pas avec plaisir le choix qui lui était proposé. Je reçus quelques jours après un télégramme m’annonçant l’agrément du nouveau nonce et j’en fis part au cardinal secrétaire d’état. Le Saint-Père fut très sensible à notre empressement à ratifier un choix qui émanait, comme je l’ai dit, de son initiative personnelle et il m’en fit exprimer ses remerciemens par le cardinal Nina. — Il ne fallut pas moins, du reste, que la gravité croissante de nos affaires religieuses pour décider le Saint-Père à se séparer, en l’envoyant à Paris, d’un homme qui avait toute sa confiance et qui avait « gagné son cœur. » Ces natures polonaises ont quelquefois un charme auquel il est difficile de résister, mais celle-là était de tout premier ordre, et l’on comprend, quand on l’a connue, la sympathie qu’elle inspirait autour d’elle. Si la santé avait été chez le nouveau nonce à la hauteur de l’intelligence, nul doute qu’il n’eût réussi à conjurer bien des malentendus. Malheureusement, l’amour du travail et la conscience de ses devoirs épuisèrent ses forces, et, quand je le revis à Paris, après que j’eus quitté l’ambassade, je constatai trop souvent en lui un affaiblissement qui devait l’obliger assez promptement à abandonner la nonciature et à rentrer à Rome. Il y mourut peu de temps après que le chapeau cardinalice lui eut été remis, laissant à tous ceux qui l’avaient connu intimement de sincères et unanimes regrets.

Avec Mgr Czacki, nommé à Paris en remplacement de Mgr Meglia, le choix du Saint-Père s’arrêta, pour Vienne, sur Mgr Vannutelli, nonce à Bruxelles, en remplacement de Mgr Jacobini : sur Mgr Aloisi Masella, qui de Munich passait à Lisbonne ; sur Mgr Roncetti, transféré du Brésil à Munich ; sur Mgr Bianchi à Madrid. Mgr Cretoni remplaça Mgr Czacki comme substitut de la secrétairerie d’Etat. C’étaient tous d’excellens choix, et les anciens titulaires, qui m’étaient tous personnellement connus, furent créés cardinaux dans le consistoire du 19 septembre.

Toutes ces nominations produisirent un bon effet. En renouvelant ainsi le personnel des nonciatures, Léon XIII y infusait en quelque sorte un esprit nouveau. C’était le digne complément du premier mouvement cardinalice et l’on n’était pas loin d’atteindre le chiffre des soixante-dix cardinaux composant le Sacré Collège et qui n’est jamais dépassé. Le Saint-Père se montrait ainsi fidèle à la règle qu’il s’était tracée de ne faire autant que possible que des choix amplement justifiés par la valeur et la distinction personnelle des candidats. L’horreur de la médiocrité