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sentiment que les vaincus dans le combat pour l’existence ont droit aux secours de la communauté, que c’est là un devoir de conscience publique. Le gouvernement ne s’occupe pas directement du paupérisme, mais il accorde un subside égal aux taxes que s’impose la, colonie à cet effet.

Le système de la Grande-Bretagne est celui-ci : appliquer rigoureusement la loi des pauvres aux vagabonds qui obtiennent le souper et le gîte dans le workhouse, mais à la condition qu’ils payent leur écot le lendemain par du travail ; éviter l’aumône faite à la porte ou dans la rue ; prendre toujours la peine d’interroger le mendiant et le diriger ensuite vers la société spéciale qui peut l’introduire, valide, dans un atelier ; malade, dans un hôpital ; infirme, dans un asile. La société d’organisation de la charité à Londres fonctionne avec une précision inouïe. Elle compte huit cents membres volontaires, et des sociétés correspondantes existent dans les villes de province. Les méthodes de secours commencent à influencer la foule des personnes charitables qui faisaient indistinctement, l’aumône, en contrariant par une action adverse la charité raisonnée. Rien ne contribue à encourager le goût salutaire de l’indépendance chez ceux que la misère avait rendus dépendans comme la connaissance exacte de ce qu’ils peuvent attendre des autres et de ce que les autres attendent d’eux. L’organisation de la charité s’est établie aux États-Unis sur les mêmes bases qu’en Angleterre, avec la même annexe indispensable de social settlements.

M. Augustin Filon a exposé dans la Revue[1] les procédés de ces admirables « colonies sociales » qui sont comme une association de toute la famille humaine sur un pied de bon voisinage. Il les a fait trop bien connaître pour que nous en parlions après lui.

Au fond, la colonie sociale, tout en se rattachant à l’œuvre des missions, est un club, et le club en général est le plus puissant moyen d’action que les femmes aient trouvé jusqu’ici.

Il a surgi en Angleterre, où les hommes donnèrent l’exemple. Dès 1770, une première coterie féminine apparut, manifestation éphémère dont le réveil se lit attendre plus d’un siècle ; ensuite, trois douzaines au moins de clubs mondains, littéraires, philanthropiques et autres virent le jour presque à la fois. Leur succès

  1. 1er novembre 1900.