Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 1.djvu/914

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Et c’est ainsi qu’après avoir successivement écarté tous les types d’organisation administrative pratiqués par les autres puissances, les commissaires américains concilient que le régime national des « territoires » semble avoir été inventé, il y a près d’un siècle, pour l’usage propre des Philippines. On leur donnera un gouverneur, des fonctionnaires et des juges, hauts ou moyens, nommés pur le Président, des Etats-lTnis, les citoyens américains pouvant être, sauf de rares exceptions, nommés sans examen, les indigènes seulement après avoir fait preuve de capacités suffisantes. On créera un Parlement, local de deux Chambres : la première se composera par moitié de fonctionnaires et de membres élus ; la seconde sera tout entière élective, « le droit de suffrage étant subordonné à des conditions de capacité ou de fortune, ou peut-être à toutes deux. » Ce Parlement pourra s’occuper à reviser les codes espagnols, qui demeureront provisoirement en vigueur, mais, pour le cas d’écart de conduite, le Congrès de Washington retiendra son pouvoir législatif suprême, lequel, aux termes de la jurisprudence, peut s’exercer sur les territoires sans limitation quelconque, sauf pour ce qui concerne l’esclavage. Kn échange, les Philippins auront le droit d’entretenir près de lui un délégué consultatif.

Ainsi, pus plus d’autonomie que d’indépendance, en matière législative tout au moins. Les Philippins seront-ils mieux partagés sous le rapport de l’administration locale ? On pourrait le croire tout d’abord, l’enquête concluant à leur accorder une large part d’autonomie communale. Mais ici encore, disent nos commissaires, les habilans aspirent « à une indépendance plutôt appropriée qu’absolue ; ils s’attendent à être contrôlés et réglementés par le gouvernement central de Manille. » On leur donnera donc des assemblées dans la commune ; on leur en créera même dans la province, pour faire plus tard de celle-ci quelque chose d’analogue au comté américain, mais toujours en subordonnant le droit de vote aux conditions de capacité et de fortune ; le Parlement local, et au besoin le Congrès de Washington, fera les lois nécessaires à cet effet. Quant au contrôle, il s’exercera par l’intermédiaire de quelques hauts commissaires américains : il y en aura, par exemple, un pour 250 000 habitans ; ils ne seront là que pour surveiller et conseiller, mais il est bien entendu, — les termes sont formels, — « que leur avis sera demandé et suivi dans toutes les questions ne concernant pas la religion et les