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jus de citron, d’autres sucs végétaux ont été employés avec succès. On ne saurait énumérer tous les moyens. Une question théorique très intéressante se pose, c’est de savoir s’il n’y aurait pas, pour cette coagulation, un agent naturel analogue à celui qui coagule le sang et le lait, c’est-à-dire une diastase spéciale comparable à la présure et à la thrombose du sang.

En tout cas, de tous ces moyens, celui qui est de beaucoup préféré par les acheteurs européens, c’est l’enfumage, pratiqué dans la région de l’Amazone, et qui fournit le caoutchouc de Para, le plus estimé. L’ouvrier, le cauchero, trempe dans le vase qui contient la récolte du liquide laiteux une palette en bois qu’il expose à la fumée d’un feu de branches. Le latex se coagule et se sèche, en même temps qu’il s’imprègne de vapeurs empyreumatiques qui en assurent la conservation. L’homme répète cette opération en trempant une seconde fois la palette dans le récipient, et ainsi de suite, jusqu’à ce que les couches accumulées forment à peu près un poids de 5 kilogrammes. Il incise alors la masse sur le côté et la sépare de la palette. Cette opération est simple et économique. Il faut ajouter qu’elle est souvent pernicieuse pour les yeux et que beaucoup de ces ouvriers caucheros y perdent la vue.

En ce qui concerne la gutta, on l’obtient en abandonnant le suc à la coagulation spontanée, ou quelquefois en le jetant dans l’eau chaude et en l’y soumettant à une sorte de brassage.


IV

Au point de vue chimique, le caoutchouc est formé de carbures d’hydrogène, terpènes ou polyterpènes. Mais il est mêlé à des produits azotés plus ou moins abondans qui l’exposent à une sorte de putréfaction. Cette altération le rend visqueux et gluant. M. Jumelle a indiqué un moyen de le régénérer. Il le réduit en pâte au moyen de l’éther, puis le précipite par addition d’un égal volume d’alcool. La partie visqueuse reste en solution : la masse ; est ainsi débarrassée du produit poisseux qui la souillait.

Trois particularités ont nui pendant assez longtemps aux applications du caoutchouc : il perd son élasticité) et sa souplesse au-dessous de la température de 10° ; au-dessus de 30°, il se soude à lui-même comme fait la glu ; enfin, il est altérable, comme nous venons de le dire. La vulcanisation fait disparaître ces défauts.