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M. Seligmann-Lui, envoyé à Sumatra avec la mission d’y recueillir des plants pour les importer en Indo-Chine, conseillait, en 1883, de créer des exploitations de ce genre, sur place, « dans un pays de production actuelle, où la présence spontanée des arbres à gutta est la plus sûre preuve qu’ils peuvent y prospérer ; » il désignait, par exemple, la Côte orientale de la presqu’île de Malacca. Les Hollandais, sur divers points de leurs possessions, sont, en effet, parvenus à établir de nombreuses plantations de guttiers. Ces plantations réussiront-elles ailleurs ? L’explorateur Raoul a recueilli à Sumatra et rapporté, dans les serres de Marseille, en juillet 1898, environ 1 500 plants provenant de graines tombées au pied des arbres et entrées en germination. Le tiers de ces plants a été transporté au Congo par M. P. Boudarie ; un autre tiers a été distribué à des planteurs des Antilles et de la Guyane par M. H. Lecomte. D’autre part, M. Jacquet, inspecteur de l’agriculture en Cochinchine, rapporta de Singapour, en 1897, sept cents plans, dont une centaine se trouvaient, deux ans plus tard, dans un état de végétation suffisant, particulièrement au champ d’essais de Ong-Yem. L’avenir fera connaître si ces tentatives d’acclimatation peuvent fournir des résultats comparables, fût-ce de très loin, à ceux des plantations hollandaises.


VII

Ce sont là des expériences à longue portée. En attendant les récoltes futures, on a songé, à mieux régler l’exploitation des plantations actuelles. En quelques années, le procédé barbare qui est encore en usage avait détruit des millions de ces arbres précieux. Il faut songer qu’un guttier qui a mis plus de trente ans à croître ne peut guère fournir au-delà de 250 grammes de gutta, et que, pour obtenir cette minime quantité, il faut sacrifier l’arbre. Les indigènes le coupent à un mètre du sol.

Il est difficile d’opérer autrement dans les forêts vierges, où les espèces végétales forment des lacis inextricables. Mais, dans les plantations culturales, on pourra se contenter de récolter les branches et les feuilles. Celles-ci contiennent des quantités très appréciables de suc. Lorsque l’on déchire une feuille fraîche de Palaquium, les deux fragmens sont retenus par des fils nombreux de gutta qui s’étirent.