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ESSAIS ET NOTICES


Lettres de Madame Roland, publiées par M. Claude Perroud, recteur de l’Académie de Toulouse. Tome Ier, 1780-1787. Un vol. in-8o, LXXXVI-720 pages ; Paris, MDCCCC, Imprimerie Nationale.


Et comment donc ? Est-ce que par hasard le rôle de la femme, et sa principale assurance de bonheur en ce monde, serait d’avoir « un mari, des enfans, un ménage ; » de prendre part aux intérêts de l’un, d’élever honnêtement les autres, et d’administrer le troisième avec économie, prudence et dignité ? C’est au moins ce qu’on est tenté de croire en achevant la lecture du premier volume des Lettres de Madame Roland, publié par M. Claude Perroud dans la Collection des Documens inédits sur l’histoire de France ; et, sans avoir besoin que le second vienne prochainement confirmer cette première impression, nous pouvons dès aujourd’hui la fixer.

Tout le monde connaît Madame Roland, je veux dire la Muse ou l’Égérie classique de la Gironde, ne fût-ce que par ses Mémoires, ou par le théâtre, puisque c’est au théâtre que les Français apprennent généralement leur propre histoire ; et tout le monde connaît Mademoiselle Phlipon, par ses Lettres aux demoiselles Cannet, qui ne sont pas seulement l’une des correspondances les plus intéressantes que le XVIIIe siècle nous ait léguées, mais l’une encore des plus instructives ; et peut-être l’un des chefs-d’œuvre de notre littérature épistolaire. Nous savons aussi comment, dans sa vingt-septième année, Mlle Phlipon, — après avoir manqué presque autant de mariages que jadis la Grande Mademoiselle, mais de moins brillans, et plus heureuse d’ailleurs en son choix que cette petite-fille d’Henri IV, — devint Mme Roland de la Platière. Mais, des trois personnages qu’elle joua dans sa courte existence, celui que nous ne connaissions pas, ou du moins que nous connaissions à peine, par quelques pages de ses Mémoires, ou quelques-unes de ses Lettres à Bosc, c’est Mme de la Platière ; et,