Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 2.djvu/74

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’ouest et le territoire du Transvaal, croisaient la route des officiers du roi de Portugal et faisaient de rapides progrès vers le nord : dès 1887, ils soumettaient à leur protectorat le pays de Khama. En même temps ils lançaient en avant, par le Zambèze, des pionniers hardis et entreprenans, les missionnaires des sociétés bibliques, qui devenaient partout les meilleurs agens de l’influence britannique et lui préparaient les voies. Protégés par les apparences de la neutralité et du désintéressement, ils s’avancèrent, sous la sauvegarde des autorités portugaises, jusqu’au cours supérieur du Zambèze et au lac Nyassa ; ils furent les premiers organisateurs de cette Compagnie des Lacs (Afrikan lakes C°) qui joua dans la crise un rôle très actif, et qui servit, pour ainsi dire, d’agent provocateur au Colonial Office. Bientôt, une grande partie du commerce du Chiré et du Zambèze se fit par les bateaux de la Compagnie, en même temps que d’autres sociétés du même genre opéraient au sud du fleuve. Les agens, missionnaires ou commerçans, de toutes ces associations devinrent bientôt si nombreux et surtout si remuans et si exigeans que le gouvernement put à son tour intervenir : la pièce était suffisamment préparée ; le prologue avait réussi à souhait ; l’on pouvait précipiter le dénouement.

Le 13 août 1887, les ministres de la Reine signifièrent au gouvernement du roi de Portugal que l’Angleterre ne reconnaissait pas ses droits sur les pays du Nyassa et du Machona ; or ces mêmes droits avaient été implicitement et même explicitement admis au cours des années précédentes.

En même temps une expédition, organisée sous les ordres de MM. Colquhoun et Seelous, s’avançait vers les territoires contestés et contractait alliance avec Lobengula, roi des Matabélés. Ce fut le prélude de l’usurpation anglaise. Bientôt l’entrée en scène d’un élément nouveau, la Compagnie de l’Afrique du Sud, constituée par la fusion de deux anciennes sociétés, et surtout issue de la volonté d’un homme résolu à tout pour parvenir à ses fins, le « Napoléon du Cap » M. Cecil Rhodes, vint hâter un dénouement qui, en dépit du droit, n’était déjà plus douteux. En vain le gouvernement de Lisbonne, pour affirmer sa souveraineté ; sur les territoires en litige, essaya-t-il de les organiser par décret en une nouvelle province avec Zumbo pour centre (9 novembre 1889) ; on lui fit entendre qu’il n’avait pas à organiser des pays qui de pouvaient être qu’anglais. Dès lors les