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Lebombo qu’ils découpent en plusieurs tronçons, viennent mêler leurs eaux et former un port naturel long de 13 kilomètres, où les navires de tonnage moyen trouvent un excellent abri et où les bâtimens plus puissans, obligés de stationner dans la rade, d’ailleurs très sure, vont bientôt, grâce à des améliorations incessantes, pouvoir pénétrer.

La ville de Lourenço-Marquès s’allonge le long de la rive nord de l’estuaire ; elle travaille avec ardeur à dessécher les marais parmi lesquels elle s’était blottie pour échapper aux incursions des Zoulous, mais qui aujourd’hui gênent son essor et enfièvrent ses abords ; les noirs, les coolies de race jaune, les marchands indous continuent de peupler les parties basses ; mais une cité nouvelle, plus saine et plus élégante, s’élève rapidement sur la colline prochaine et abrite le population blanche. Du port même part le chemin de fer qui, d’abord à travers les plaines basses, inondées et couvertes de forêts du territoire portugais, puis par-dessus les rampes escarpées du plateau transvaalien, se dirige vers Johannesburg. La cité de l’or n’est en effet qu’à 624 kilomètres de Lourenço-Marquès, tandis qu’elle est à 1 696 kilomètres du Cap ; le port naturel du Rand est donc la baie Delagoa. Aussi Lourenço-Marquès est-il bien moins un port du pays de Gaza que le port du Transvaal ; les exportations de l’étroite bande côtière portugaise, large d’à peine 50 kilomètres, sont à peu près nulles, quoique le district soit naturellement fertile. Dans la ville même, presque tout vient de l’étranger, depuis les bois de Norvège, les briques et le ciment français, jusqu’aux viandes gelées importées d’Australie et au charbon descendu, des mines du Transvaal, jusqu’aux gros négocians qui sont, pour la plupart, anglais, français, grecs, aux petits détaillans qui sont des banians de l’Inde et aux portefaix du port qui sont des coolies asiatiques ou des noirs. Lourenço-Marquès n’est donc pas une ville portugaise, mais une ville cosmopolite, où font escale les paquebots de toutes les grandes lignes de navigation dont une seule est portugaise, un caravansérail où passent les voyageurs et s’entassent les marchandises destinées à l’intérieur.

Les fonctionnaires du gouvernement sont portugais, ainsi que les quelques troupes destinées à la police du territoire ; l’administration s’acquitte du mieux qu’elle peut de sa tâche, difficile et surtout très onéreuse pour les finances de la métropole. Le