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Nous ne savons quelle part revient au hasard dans la rencontre du comte de Bulow et de M. Zanardelli à Vérone. Le premier se rendait pour quelques jours à Venise, le second allait nous ne savons où : ils ont passé quelques instans ensemble sur le quai d’une gare et se sont quittés en échangeant de chaudes poignées de main. Que se sont-ils dit ? Nul ne le sait ; mais il n’est pas téméraire de croire que M. Zanardelli a mis son interlocuteur en garde contre les conséquences exagérées que des nouvellistes trop prompts pourraient tirer des démonstrations qui se préparaient à Toulon. Tout, dans la conduite de l’Italie, est calculé de manière à ne produire qu’une impression en quelque sorte limitée. Elle ne veut, ni se dégager d’un côté, ni se laisser engager d’un autre. Nous n’avons pas besoin de dire que personne n’a songé à cette seconde hypothèse ; mais elle serait inévitablement née dans les esprits, si on avait vu à Toulon la Russie avec la France, et l’Italie venant se joindre à elles. Le but aurait été dépassé. Le gouvernement russe l’a compris très spontanément, et a fait preuve de discrétion en envoyant ses vaisseaux à Villefranche de préférence à Toulon. Non pas que le pavillon russe ait manqué aux. fêtes de Toulon : il y a été porté par plusieurs torpilleurs et par un croiseur. Tout, dans cette mesure, a été parfait, parce que tout a été clair, comme le ciel lui-même qui illuminait cette belle fête. En somme, c’est aux puissances méditerranéennes qu’a appartenu la journée de Toulon, car, à côté de la France et de l’Italie, nous ne saurions oublier l’Espagne, qui a voulu nous donner aussi une marque de son amitié en y envoyant un de ses plus beaux navires. Nous en avons été fort touchés.

Les discours qui ont été prononcés ont été ce qu’ils devaient être, et nous souhaitons qu’ils aient produit en Italie le même effet que chez nous. La France n’oubliera pas qu’un des premiers actes du gouvernement du roi Victor-Emmanuel III a été pour elle un témoignage de sympathie.


Depuis assez longtemps nous n’avons pas parlé de l’Extrême Orient : il ne s’y passait rien qui méritât d’être signalé particulièrement à l’attention. Les négociations pour le rétablissement de la paix, ou, si l’on veut, d’un état normal en Chine, se poursuivent avec beaucoup de lenteur et aussi dans un certain mystère. M. Delcassé, le comte de Bulow, lord Lansdowne, ont bien fourni à ce sujet quelques indications à leurs parlemens respectifs ; mais elles ont été assez sommaires, et n’ont même pas été toujours confirmées par les faits ultérieurs. Il ne s’agit pas, bien entendu, des grandes lignes du