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Fête-Dieu. Dès le lendemain de son arrivée, il suivait publiquement la procession du Saint-Sacrement.

Pour cette campagne, Louis XIV lui avait attaché Marcin, comme, pour la précédente, il lui avait attaché d’Artagnan. Mais, soit que Marcin ne comprît pas son devoir comme d’Artagnan, soit que sa correspondance avec Chamillart ait été perdue, il ne se trouve pas au Dépôt de la Guerre une seule lettre de lui, relative à cette campagne. Aussi, pour nous renseigner sur les mouvemens du Duc de Bourgogne, en sommes-nous réduits aux dépêches que Tallart et le Duc de Bourgogne lui-même adressaient au Roi, et aux lettres du Duc de Bourgogne à Beauvillier[1]. Les dépêches de Tallart n’ont point, quand il parle du Duc de Bourgogne, l’accent de déférence émue que nous avons trouvé dans celle de Boufflers. Parfois même il semble qu’elles soient un peu railleuses. « M. le Duc de Bourgogne a fait ses dévotions aujourd’hui, écrit-il, dans l’une d’elles. Celle où il est augmente tous les jours. Il joue quelquefois, monte à cheval, quand il y a un objet à la promenade, du reste est très souvent enfermé tout seul, et, quand il est en public, il en use fort honnêtement avec tout le monde[2]. »

Les lettres du Duc de Bourgogne à Beauvillier sont plus longues et plus militaires que celles qu’il lui adressait de Flandre l’année précédente. Il lui donne d’assez mauvaises raisons pour soutenir auprès du Roi les plans médiocres de Tallart, par les yeux duquel il voit uniquement. Mais il l’entretient souvent aussi de ses dévotions et de ses scrupules. « J’ai été un peu dissipé ces derniers jours, lui écrit-il, mais je me calme un peu aujourd’hui… Dites-moi, je vous prie, ce que vous croyez que je doive faire, cette campagne à propos des jeûnes qui se rencontreront de temps en temps, car vous savez qu’ils me seront bientôt d’obligation. » Et dans une autre lettre : « J’ai été un peu tourmenté ces jours-ci par des scrupules sur mes devoirs et des choses dont je pouvais être la cause par omission, ce qui m’a quelquefois jeté dans des troubles. Mais, quand je suis de sang-froid, je n’ai point d’envie de me décourager et me jette entre les bras de la miséricorde divine pour fortifier ma faiblesse et suppléer à mon insuffisance, car lui seul peut me soutenir et le jus de tout

  1. Les plus importantes de ces dépêches ont été publiées par Pelet : Mémoires militaires, t. III.
  2. Dépôt de la Guerre. 1664. Tallart au Roi, 24 juin 1703.