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à Saint-Jean-Bonnefonds, la journée du piqueur était de 25 sous ; celle des porteurs et autres ouvriers de 20 sous. En 1778, elle n’avait pas augmenté, et demeurait même, à Firminy, un peu au-dessous. En 1786, le marquis d’Osmond la portait à 1 fr. 20. De 1785 à 1808, hausse énorme dans le salaire moyen des mineurs, qui passe de I fr. 25 à 3 fr. 50, plus que le double. En 1812, salaire des piqueurs et traîneurs, 3 fr. 50 ; boiseurs et remplisseurs de bennes, 2 fr. 50 à 2 fr. 75 ; ouvriers divers, de 2 fr. à 2 fr. 50. Vers 1830, les piqueurs ne reçoivent à Firminy et à Roche-la-Molière que 2 fr. 50 ; à Saint-Étienne, ils n’atteignent qu’exceptionnellement 3 francs ; mais ils gagnent, à Rive-de-Gier, de 3 fr. 50 à 4 francs par jour ; les boiseurs, de 1 fr. 50 à 2 francs. Les porteurs et routeurs de 2 francs à 2 fr. 25. Enfin, de 1838 à 1898, l’élévation des salaires « a été continue et sans retour en arrière. » Le prix moyen de la journée du piqueur a été, en effet : 1835, 3 fr. 50 ; — 1845, 3 fr. 75 ; — 1854, 4 fr. 40 ; — 1868, 4 fr. 70 ; — 1889, 5 fr. 65 ; — 1897, 6 fr. 05. La journée moyenne de l’intérieur ou du fond a été, durant cette période de cinquante ans : 1846, 3 fr. 33 ; — 1860, 3 fr. 60 ; — 1868, 3 fr. 92 ; — 1891, 4 fr. 72 ; — 1898, 4 fr. 98[1].

Mais je n’insiste pas. Il est ici doublement inutile d’accumuler des chiffres dont la masse projette toujours sur une page comme une ombre d’ennui, parce que, je le répète, les comparaisons de statistique, soit dans le temps, soit dans l’espace, donnent ouverture à trop de méprises ou d’erreurs, et parce que ce n’est pas en fin de compte l’histoire du passé qui nous intéresse le plus, ni même son rapport à la vie du présent, mais d’abord et surtout la vie elle-même du présent. L’homme, qui ne vit pas « de moyennes, » ni « généralement, » ne vit pas non plus dans le passé, ni par rapport au passé : il vit de ce qu’il a comme on peut en vivre dans le temps où il vit. Pour une semblable raison, à peine serait-il moins inutile de rapprocher du salaire dans les mines de houille les salaires dans la

  1. Voyez E. Leseure, Historique des mines du département de la Loire, p. 38, 51, 82, 86, 98 et 99, 183, 251, 266. — Ceux de nos lecteurs qui prennent goût à ces rapprochemens historiques trouveront, dans ce livre, p. 98 et 99, deux tableaux où sont consignés les salaires dans les mines de Rive-de-Gier, en 1760, 1784, 1814, et de Saint-Étienne en 1709, 1750, 1778, 1812, pour le personnel, déjà et de jour en jour plus compliqué, des gouverneurs, piqueurs, porteurs ou traîneurs, remplisseurs de bennes, receveurs du fond, receveurs marqueurs du jour, palefreniers, forgerons, garnisseurs de lampes, réparationnaires, hommes du boisage et muraillement, toucheurs de chevaux, manœuvres aux pompes et autres ouvriers.