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toujours infatigable pour le service de son prince, avait été chercher à Turin pour remplacer Barrande.

Le gouverneur avait aussi pour lui le cardinal de Latil, le duc de Blacas, M. Capelle, ancien ministre, le comte et la comtesse de Bouille, le comte O’Hégherty, écuyer, enfin M. Guignard, ancien capitaine de gendarmerie, officier habile, intelligent, bel homme et bien tourné, qui avait donné sa démission en 1830.


Une difficulté de plus, lisons-nous dans la relation déjà citée, vint compliquer les affaires déjà assez embarrassées. La diplomatie s’expliqua sur le choix qu’avait fait Charles X, et malheureusement ne l’approuva point. On peut croire que ces observations parvinrent au prince plus respectueuses que celles de Paris, mais enfin elles portèrent coup ; on en profita pour pousser la Dauphine ; celle-ci, abattue enfin, poussa à son tour le monarque, et ce prince, excédé plutôt que convaincu par toutes ces sollicitations et ces instances, finit par dire d’un air extrêmement peiné : « Eh bien ! faites donc ce que vous voudrez !


Cependant un obstacle, que Charles X aurait dû prévoir, faillit tout rompre. Le baron de Damas avait appelé les Jésuites sur l’ordre du Roi ; il ne pouvait, en restant, sembler approuver leur renvoi. Cette déclaration inattendue affecta vivement Charles X et sa famille. Rien ne fut épargné auprès du baron pour vaincre sa résolution : on se heurta à l’inflexibilité de principes que les ennemis mêmes de M. de Damas s’accordèrent toujours à lui reconnaître.

Le Roi néanmoins crut avoir trouvé un biais qui, en satisfaisant à des exigences momentanées, pût tout concilier. C’est le propre des caractères faibles de chercher à revenir, par des demi-mesures, sur les concessions qu’ils sentent avoir accordées à tort. En désignant pour gouverneur le général de Latour-Maubourg, il savait que ce brave et loyal militaire ne pourrait, à cause de ses glorieuses blessures, en exercer les fonctions. Il en était à peu près de même de Mgr Frayssinous, évêque d’Hermopolis, que l’âge et les infirmités dissuaderaient sans doute de s’exposer à tous les inconvéniens d’un voyage de plus de quatre cents lieues et aux fatigues d’un genre de vie si opposé à ses goûts, à ses habitudes ; ou, s’il acceptait et qu’il vînt, on devait croire que, ne pouvant lui-même exercer ses fonctions, il serait trop heureux de conserver l’un des Jésuites. C’était toujours gagner du temps !

Nous ne décrirons pas la douleur du Duc de Bordeaux à la