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le bonheur de la société, la justice, la prudence, la bienveillante l’activité… Il n’a été ni un grand conquérant, ni un grand réformateur, ni un grand législateur ; mais, par la force de ses vertus personnelles, il a porté le renom et la puissance de son royaume ; plus haut qu’aucun de ses ancêtres. »

Cette appréciation d’un historien anglais[1] ne s’applique telle pas d’une manière frappante au Comte de Chambord ? L’unité d’une vie sans faiblesse, la fermeté d’une ligne de conduite délibérément arrêtée dans le calme de l’exil, des vues politiques et sociales en avance sur son siècle, exposées dans des lettres et des manifestes dont la valeur littéraire ne le cède qu’à la générosité de leur inspiration, ont plus fait, à notre avis, pour cause de la monarchie, que n’eût fait la réalisation du règne constitutionnel offert à Henri V en 1873. Et ce n’est pas une des marques les moins visibles de la Providence en faveur de ce principe, que la continuité de la doctrine chez ses représentans malgré l’abîme qu’avait paru creuser 1830 entre les deux branches françaises de la maison de Bourbon, malgré les différences d’éducation et de caractère qui donnent à chacun de nos princes leur physionomie propre.

Qu’il me soit permis, en terminant, de relater ce souvenir personnel. Lorsqu’en 1875 j’eus l’honneur d’être présenté à M. le Comte de Chambord par ma tante la duchesse de Blacas, le Roi me dit : « J’ai eu de nombreux gouverneurs ; c’est de votre grand-père que je crois avoir le mieux retenu les leçons. » Si le baron de Damas avait vécu, aucun témoignage ne lui eût été aussi précieux, venant de celui qui, deux ans auparavant, avait refusé d’être « le roi légitime de la Révolution. »


Cte DE DAMAS D’ANLEZY.

  1. Frédéric Perry.