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vales de l’Angleterre n’avait été présentée que comme une nécessité du moment ; elle ne répondait pas à une idée générale, tandis qu’aujourd’hui et depuis 1895, la conception du Sea Power, de sa nature, de ses sources, de ses responsabilités, de ses conditions, constitue en Angleterre la base de toutes les idées maritimes, et est adoptée par la nation, ainsi que par ses gouvernans, comme le seul vrai fondement de la politique navale britannique : Sea Power, articulus stantis aut cadentis Imperii. Pour un État comme l’Angleterre, commercial, maritime et conquérant, le Sea Power n’est pas seulement un élément accidentel de force nationale, il est le fond même, la condition absolue de l’existence.


III

La suprématie maritime ne consiste pas seulement dans le nombre des bateaux que l’on peut mettre à flot. Elle dépend encore, et plus peut-être, de l’esprit du service, du dévouement et de la capacité des officiers et des hommes pour leurs devoirs, de l’état de préparation complète et de la disponibilité immédiate de tout ce qui donne aux navires la mobilité, la capacité de combattre. Le nombre des navires de guerre est une première condition de la maîtrise de la mer. Elle n’est ni la seule ni même la plus importante. La guerre navale, aujourd’hui encore, comme aux temps passés, est une affaire d’hommes et non de machines ; les machines ne valent en effet que si elles sont manipulées par des hommes capables. On ne peut obtenir sur commande le génie du commandement en mer ; on peut obtenir, par l’exercice approprié, l’excellence des équipages.

Même dans la sphère du matériel et des constructions, tout est-il parfait en Angleterre ? C’est peu probable. Les départemens techniques de l’Amirauté ne contiennent pas uniquement des hommes supérieurs comme sir William White et sir John Durston, de même que les escadres ne sont pas commandées uniquement par des hommes de la valeur d’un Nelson. Il y a eu récemment, dans l’histoire des constructions maritimes britanniques, bien des mécomptes : les découvertes fâcheuses faites par diverses commissions techniques, les fautes commises dans la construction du yacht royal, le désastre du Spartiate et du