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parler comme M. Le Dantec, nous dirons que la substance chimique de Primus est non seulement de la substance d’homme, mais, en tous lieux du corps, dans toutes ses cellules constituantes, l’exclusive substance de Primus portant partout son empreinte personnelle, différente de celle de tout autre individu.

Mais, il n’en est pas moins vrai que cette absolue spécificité ne repose certainement que sur des différences extrêmement faibles au point de vue chimique. Tous ces protoplasmes ont une composition très analogue. Et en négligeant les minimes variations, individuelles, spécifiques, génériques ou ordinales, il sera permis de parler du protoplasme ou de la matière vivante, d’une manière générale.

L’expérience apprend, en effet, que la substance véritablement vivante, — abstraction faite des produits qu’elle fabrique et qu’elle peut retenir ou rejeter, — est dans toutes les cellules assez semblable à elle-même. La ressemblance chimique fondamentale de tous les protoplasmas est certaine, et c’est ce qui autorise à parler de leur composition typique. On peut résumer l’œuvre de la chimie physiologique depuis trois quarts de siècle en proclamant qu’elle a établi l’unité chimique de tous les êtres vivans, c’est-à-dire la très grande analogie de composition de leur protoplasme[1].

Cette matière vivante est essentiellement un mélange de substances protéiques ou albuminoïdes auquel peuvent venir s’adjoindre, à titre accessoire, d’autres catégories de principes immédiats, tels que les hydrates de carbone et les matières grasses. L’élément fondamental est la substance protéique. Les chimistes les plus habiles essaient, depuis plus d’un demi-siècle, d’en pénétrer la composition. Depuis cinq ou six ans seulement, grâce aux travaux du chimiste allemand Kossel, succédant à ceux de Schützenberger et de Miescher, on commence à en connaître le gros œuvre ou l’ossature, le noyau chimique. Celui-ci est formé de substances connues en chimie organique sous le nom de bases hexoniques. L’expérience apprend donc, en résumé, que la vie ne se manifeste actuellement dans tout son développement que dans et par un certain mélange hexonique qui est le noyau chimique de la molécule albuminoïde.

Si le principe de l’unité chimique de l’être vivant était

  1. La chimie de la matière vivante. — Revue du 1er avril 1901.