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Page:Revue des Deux Mondes - 1902 - tome 8.djvu/723

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UNE VIE D’AMOUR

AIMÉE DE COIGNY ET SES MÉMOIRES INÉDITS

DEUXIÈME PARTIE[1]


VIII

Ces Mémoires de femme commencent par une philosophie de la Révolution française. Ils décrivent le cycle des causes et des conséquences qui devaient, après moins de vingt-deux ans, ramener sur le trône la famille chassée pour jamais. Ils offrent la grande aventure d’un peuple aux curiosités qui attendent les petites aventures d’une vie. La trace d’un pas léger s’efface d’elle-même sur le sable soulevé par la tempête : c’est dans celle tempête qu’Aimée de Coigny s’abrite contre les regards.

L’oubli de soi apparaît d’ailleurs, en ces pages, sous une forme plus sincère, plus désintéressée, plus méritoire. Nos guerres civiles avaient atteint la fortune, détruit les privilèges, pris la liberté, menacé la vie de cette femme. Quels prétextes et quelles excuses de se souvenir à travers ses ressentimens ! Or elle ne songe pas à ce qu’elle a souffert de la Révolution ; elle songe à ce que la France souffrait de l’ancien régime. « Une nation spirituelle, éclairée, n’a plus voulu se soumettre aux caprices d’une maîtresse ou même d’un maître, elle a refusé de payer de son travail, de ses privations et de son sang les guerres dont le motif et l’issue lui étaient étrangers ;… elle n’a plus voulu

  1. Voyez la Revue du 1er avril.