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LA SIXTINE
AVANT MICHEL-ANGE

Le Vatican a deux faces opposées et diverses. L’une regarde le Tibre et la ville, d’un visage solennel, classique et régulier. Au pied de la haute caserne bâtie par Sixte-Quint devant les loggie de Bramante, les battans magnifiques de la grande porte de bronze restent entr’ouverts pour le visiteur. Une antichambre luisante, toujours emplie d’un roulement de pas sonores, conduit à la Scala regia, l’escalier pompeux qui monte vers les sanctuaires de Michel-Ange et de Raphaël.

L’autre face du palais apostolique tourne vers les jardins et les coteaux les lignes irrégulières et le front hérissé d’une vieille cité guelfe. De ce côté, la poterne, au pied de laquelle un suisse bariolé regarde placidement la guérite d’un petit fantassin italien, ne s’ouvre pas à tout venant. Derrière le mur d’enceinte, des constructions de brique pâlie et grise, percées de rares fenêtres, enclosent des cours désertes, où l’herbe a poussé. Une énorme masse rectangulaire, montée sur un haut glacis, s’avance en éperon vers l’abside de Saint-Pierre. Ces constructions maussades comme des pans de citadelle sont les gardiennes des trésors vers lesquels le flot de voyageurs se dirige, à travers le Vatican neuf. Les chefs-d’œuvre contemporains de Jules il et de Léon X habitent l’austère demeure de Nicolas V et la chapelle de Sixte IV. Le deuxième étage d’un bâtiment qui, du dehors, paraît abandonné, est l’appartement des Stanze. Ce donjon épais