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et cherchent à les dissuader des coups de tête, du refus de l’impôt et autres aventures illégales, qui éloigneraient d’eux les sympathies populaires. Les dissidens, disent-ils, doivent sans doute faire sentir leur influence, sous peine de cesser d’être un facteur de la vie publique ; mais qu’ils mènent la campagne de concert avec le parti libéral. Et de fait, cette agitation des non-conformistes est tombée tout à plat.

Les libéraux se flattent que cette loi, parce qu’elle favorise à l’excès les grands propriétaires et leur alliée l’Eglise anglicane, causera un vif mécontentement dans la masse électorale, discréditera les conservateurs, préparera la revanche des échecs de 1895 et de 1901. Ils voient un symptôme des plus favorables dans les élections qui, de 1901 à 1903, en particulier pendant la discussion du Bill, ont fait décroître les voix obtenues par les conservateurs de 8 pour 100, tandis que celles des libéraux se sont accrues de 39 pour 100. L’expérience prouve toutefois que les élections partielles ne donnent pas toujours le ton aux élections générales. Si même les libéraux arrivaient au pouvoir, il leur serait malaisé de refaire l’Education Act. Ils ne seraient pas assurés du concours de leurs alliés indispensables, les Irlandais, et, même avec une majorité à la Chambre des communes, « ils se casseraient la tête contre le mur de la Chambre des lords. » Lord Rosebery ne se fait aucune illusion sur ce point.


III

Si maintenant on envisage l’Education Act au simple point de vue de l’enseignement, abstraction faite des passions politiques et religieuses, on sera moins frappé par cet aspect réactionnaire que ses adversaires lui prêtent peut-être trop généreusement. Ce serait la première fois que le parti conservateur anglais prendrait des mesures franchement rétrogrades. Or l’Anglais est doué d’un sens politique trop robuste pour ne pas discerner que réaction et conservation représentent des idées qui n’ont rien d’identique. On a vu en Angleterre le parti conservateur emprunter, sans aucune gêne, aux libéraux avancés leur programme de réformes les plus aventureuses. C’est ainsi que le ministère Derby-Disraëli menait à bonne fin la grande réforme électorale de 1867, dépassant ce qu’un radical tel que Bright avait jamais réclamé. L’Education Act n’accomplit sans doute rien de pareil. Cependant, lorsque