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complétant sa propre cargaison d’effets destinés à la flotte de 1702 et si, obligée ensuite de demeurer dans ce port pendant trois hivers et d’y caréner plusieurs fois, elle n’eût eu à supporter les charges considérables de ce séjour prolongé[1]. Elle n’avait pour toute protection que le secours momentané de six mauvais vaisseaux, qui devaient la suivre jusqu’à la Havane, pour aller de là répartir entre les Antilles espagnoles les subsides fournis par le Mexique à ces colonies.

Une lettre de l’archevêque de Mexico, dont La Ralde revenait porteur, contenait en même temps les assurances non équivoques du bon vouloir dont se prétendait animé ce prélat, vice-roi de la Nouvelle-Espagne : « Votre Excellence, écrit-il, peut être sûre qu’en tout ce qui a été et est de mon devoir, je n’ai manqué à rien de ce qui pouvait contribuer à mettre la flotte en état de faire voile au premier ordre de Votre Excellence et, dans cette vue, je me suis appliqué à n’oublier rien de ce qui la regarde. Je continuerai dans les choses qui sont de mon ministère à agir si vivement, qu’il ne puisse y avoir de retardement dans l’exécution du départ, sitôt que Votre Excellence l’aura fixé et résolu… » Puis, pour se mettre personnellement à l’abri de tout reproche, l’archevêque a soin de rappeler qu’il est chargé depuis fort peu de temps du gouvernement de la colonie et, se disant tout aux ordres de Château-Renault, il termine ainsi fort humblement : « Il me reste, Seigneur Excellentissime, à prier Votre Excellence de vouloir bien m’avertir, avant qu’elle n’arrive, de tout ce que Votre Excellence souhaitera trouver ici pour Elle en particulier, et pour ce dont ses vaisseaux pourraient avoir besoin. Sur ce, je prie Votre Excellence de me favoriser de ses commandemens[2]. »

En une réponse non moins déférente à la lettre que Château-Renault lui avait envoyée par La Ralde, le général de la flotte protestait également de son zèle, assurant aussi n’être aucunement responsable des retards apportés au départ des galions. Il s’étendait ensuite sur le mauvais état de ses navires, depuis trop de temps exposés, soit aux ardeurs d’un soleil brûlant, soit à des pluies abondantes, pour pouvoir courir impunément, en hiver, les hasards d’une longue navigation. « Cette raison plus que toute autre, disait don Manuel, jointe à l’ordre de Votre

  1. Rapport de la Ralde. — Archives de la Marine.
  2. 22 mars 1702. — Archives de la Marine.