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nord et au sud de cette chaîne, l’un à Corbero, l’autre à Rande.

Pour soutenir ces batteries, Château-Renault posta tout, contre le Bourbon et l’Espérance commandés par deux officiers énergiques, La Galissonnière et Montbault, tandis que, plus en arrière, l’escadre se formait en bataille, couvrant toujours de sa gauche les galions et la ville de Redondela. En même temps, comme la côte méridionale paraissait suffisamment gardée par le prince de Barbançon, qui s’avançait dans la direction de Vigo avec trois mille hommes de milice, quatre cents chevaux et une centaine de gentilshommes, l’amiral fit passer sur le rivage nord, sous la conduite de Sorel, inspecteur des troupes de la marine, cinq cents soldats dont il disposait.

Cependant Rooke s’était rendu compte que sa flotte entière ne pouvait, sans beaucoup de risques, aller attaquer l’escadre française dans la partie reculée de la baie où elle s’abritait. Il lui paraissait plus prudent de confier cette attaque à un simple détachement, formé d’une vingtaine de vaisseaux ; mais il sentait que, n’ayant plus guère sur les nôtres la supériorité du nombre, ce détachement devait échouer dans son entreprise si une diversion, opérée sur terre, ne paralysait notre résistance du côté de la mer.


X

Aussi le lendemain, à la pointe du jour, vit-on l’armée ennemie s’approcher et s’étendre vers la rive du sud et y débarquer deux mille fantassins à une demi-lieue de nos batteries. Le duc d’Ormond, qui les commande, les forme en deux colonnes, dont l’une gagne la montagne, droit devant elle, tandis que l’autre se coule le long de la mer, par le chemin qui mène de Vigo à Redondela. A leur vue les milices espagnoles lâchent pied et « s’enfuient comme des brebis égarées[1]. » Désormais l’ennemi peut poursuivre sa marche sans trouver aucun obstacle jusqu’à la batterie de Rande, dont du Plessis-Liancourt dirige la défense ; mais là, il sera autrement reçu.

En effet, voyant que son adversaire projetait de contourner la montagne pour prendre nos ouvrages à revers par le sud, Château-Renault avait rappelé de bonne heure les troupes

  1. Albert de Caso à Blécourt, 28 octobre 1702. — Archives des Affaires étrangères.