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phans ensemble, et d’autres, de petite taille, ne dépassant pas le volume d’un oiseau de basse-cour. Le groupe comprenait des carnassiers et des herbivores, des espèces aquatiques et des espèces terrestres, des types quadrupèdes et des types bipèdes assez semblables à des oiseaux sauf la faculté de voler. Par la variété de leurs types d’organisation, ils formaient, selon le mot de F.-A.. Lucas, une sorte d’epitome de la classe des reptiles. Or, leur apparition et leur différentiation ont été aussi des phénomènes relativement brusques et soudains. Il n’est pas donc pas vraisemblable qu’ils se soient formés par le mécanisme de la sélection naturelle et qu’ils aient été détruits par suite de leur infériorité vis-à-vis des autres espèces dans la lutte pour l’existence.

Les mêmes conclusions ressortent de l’examen des premiers mammifères placentaliens. Ils se sont montrés, au commencement de la période tertiaire, d’une manière brusque ; ils ont donné lieu à une variété de formes presque aussi riche que celles des mammifères qui existent aujourd’hui ; et ils ont finalement disparu.

En dehors des paléontologistes, beaucoup de naturalistes ont signalé dans les espèces animales actuelles l’existence de variations brusques produisant un type nouveau fixé dès son apparition et ayant la valeur d’une espèce distincte de l’espèce souche. Mivart et Huxley, Clos, Camerano, Bateson, ont appelé l’attention sur l’existence de ces variations discontinues qui seraient capables d’expliquer la discontinuité des espèces. Mais la plupart des exemples mis en avant par ces auteurs peuvent être rapportés à des sortes de monstruosités ou variations tératogéniques qui auraient réussi à se fixer. C’est le cas pour les espèces d’astéries à bras nombreux, pour les crinoïdes à trois ou quatre divisions, pour un certain nombre d’espèces de gastéropodes à enroulement gauche. Cependant, dans des conditions tout à fait normales, des transformations brusques ont été signalées par les entomologistes. Standfuss, à qui l’on doit des expériences très intéressantes sur l’hérédité chez les papillons, a parlé de « transformation explosive, » pour exprimer la richesse de formes nouvelles produites subitement par une espèce souche.


III


L’origine de la théorie nouvelle de H. De Vries doit être cherchée dans cette masse d’observations, de faits et d’idées théoriques relatifs à la variation brusque des espèces, en opposition avec l’idée