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supériorité de leur race et de leur civilisation, ne tardèrent pas à devenir les maîtres de leurs oppresseurs. Au commencement du XVIIe siècle, ils constituèrent une monarchie héréditaire, dont la fondatrice fut la reine Rangita. M. Alfred Grandidier a dressé le tableau chronologique des rois qui ont régné sur la Grande-Ile jusqu’à Ranavalo Manjaka III, et, parmi eux, se trouvent des guerriers redoutables et des administrateurs habiles. Un code avait été promulgué, une armée régulière organisée, et plusieurs premiers ministres ont donné des preuves indéniables de leurs aptitudes pour les affaires. Les Hova sont des hommes d’une intelligence assez raffinée, très loquaces, ce qui est du reste commun à tous les Malgaches, et il n’y a pas de fête dans la Grande-Ile sans « kabary, » sans « palabre. » En résumé, ils sont très aptes à exercer les professions d’avocats, de médecins, de musiciens, d’artistes, d’industriels d’art, et de marchands.

Les Betsiléo, au contraire, s’adonnent presque exclusivement à l’agriculture. Ce sont les véritables paysans de Madagascar. Quant aux autres peuplades du Sud, je ne saurais mieux faire que de citer les pages écrites par le colonel Lyautey à leur sujet :

« Quand on va de Fianarantsoa à Fort-Dauphin, il semble, au cours de cette marche de 500 kilomètres, qu’on voie s’étager devant soi, comme en une coupe géologique, tous les âges de l’histoire. A Fianarantsoa, le nombreux groupement hova établi dans le Betsiléo en est, par le costume, l’habitation, et aussi par l’assimilabilité intellectuelle et l’instruction, au degré le plus avancé de la civilisation moderne. Quelques-uns sont déjà des bourgeois de France. Les Betsiléo eux-mêmes nous présentent une race rurale très voisine de certaines des nôtres ; les petites métairies isolées, nommées « vala, » qu’ils préfèrent au groupement par villages et qui sèment la campagne, entourées de jardins, de haies fleuries, de champs de pommes de terre et de maïs, évoquent tels aspects du Perche et de la Bretagne.

« En descendant au Sud, nous trouvons les Bara. Ici, nous remontons dix siècles. Nous sommes chez les féodaux. La haute caste des Zafimanély détient héréditairement l’influence et le pouvoir ; ses représentans maintiennent jalousement leurs liens de parenté et leurs traditions. Le chef vit sur son fief au milieu de sa nombreuse clientèle, ne marche qu’entouré de ses guerriers, à qui, hélas ! nous ne laissons que le bâton en place du fusil et de la noble sagaie, au grand profit de la paix sociale, au grand