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L’ÉQUATION FONDAMENTALE

Dans une série d’études, auxquelles on pourrait donner le titre commun d’études sur l’Utilisation du Positivisme, j’ai tâché de montrer : — qu’on ne saurait employer, contre la philosophie du XVIIIe siècle, dont l’esprit vit encore parmi nous, de secours plus efficace que celui du positivisme ; — qu’il y avait une métaphysique d’impliquée dans une doctrine qui s’était prise elle-même et donnée longtemps pour la négation de toute métaphysique ; — et qu’enfin, cette métaphysique avait abouti, non seulement en théorie, mais en fait, à l’établissement d’une véritable religion. « La religion positiviste, écrivait naguère un philosophe, adversaire d’ailleurs acharné du positivisme, est la partie la plus intéressante de l’ensemble du positivisme ; » et c’est le même qui constatait que, tandis que « la philosophie positiviste n’a plus guère d’existence propre, » au contraire, « la religion positiviste ne s’est pas éteinte avec son fondateur, » mais « elle conserve encore quelques adhérens en France, et de plus nombreux en Angleterre. » (Ch. Renouvier, Philosophie de l’histoire, IV, 245.]

J’ai, d’autre part, insisté sur cette observation capitale, dont les positivistes eux-mêmes de laboratoire, physiciens, chimistes, médecins, ne contestent plus la vérité, que le dessein d’Auguste Comte, son dessein principal et premier, n’avait de tout temps été que de faire servir la totalité de la science acquise à l’édification de la « sociologie. » Et, à ce propos, j’ai fait observer que, si quelques savans, dans l’histoire, ne se sont proposé pour objet que la découverte pure et simple de la vérité, on ne connaît pas un philosophe digne de ce nom qui ne se soit, au contraire, soucié de la pratique ou des applications bien plus que de la théorie. La Critique de la Raison Pure, on ne saurait se lasser