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permanente des États faibles occupe une des premières places. La neutralisation des États se présente aujourd’hui dans des conditions bien différentes de celles où elle se présentait au siècle dernier. Dans les temps passés, et particulièrement au commencement du XIXe siècle, la neutralisation d’un petit État comme la Suisse était généralement regardée comme un cadeau que lui faisaient les grandes puissances de l’Europe. A présent, la déclaration de la neutralité permanente devrait être reconnue comme la manifestation d’un droit individuel ou personnel de l’État : c’est la pacification perpétuelle et solennelle d’un État. Plus il y a de nations permanentes neutres, mieux le règne de la paix dans les relations internationales est assuré. Plus grand est le nombre d’États neutralisés, plus seront restreintes les limites des conflits sanglans entre les peuples. Parmi les petits États dont la neutralisation a été, surtout dans ces dernières années, proclamée légitime et nécessaire, se trouve le Danemark. Par son bon sens, ses mœurs politiques, ses coutumes, fondées sur une sorte de probité sociale, comme par sa vénération sans bornes pour son vieux roi et la famille royale, la petite nation danoise a su conquérir les plus sincères sympathies de tous ceux qui la connaissent.

Il est donc naturel que les vrais amis du Danemark se soient depuis longtemps occupés de garantir à ce petit pays une existence désormais sans danger et sans crainte de catastrophes extérieures. En Danemark même, les meilleurs patriotes ont envisagé la question de la neutralisation de leur pays comme un moyen pratique de sauvegarder son intégrité et son indépendance. Tout récemment, grâce à la conférence de La Haye, cette question a été discutée et examinée sous tous les rapports par les organes autorisés de l’opinion publique non seulement en Danemark, mais en Suède et en Norvège. Dans ces deux derniers pays, on se flatte de l’espoir que la neutralisation du Danemark devrait être inévitablement suivie de la neutralisation permanente de tous les États Scandinaves.

Voilà nombre d’années que cette idée de la neutralisation des États Scandinaves nous est chère et que nous cherchons à la répandre jusque dans les sphères gouvernementales. Aussi croyons-nous le moment venu d’examiner le problème du point de vue politique, sans toucher cependant ici au fond juridique de la question