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du commerce étranger en Indo-Chine et en Malaisie, l’escale obligatoire de tous les bateaux en route pour l’Extrême-Orient. Aujourd’hui, peuplée de 185 000 habitans, mélange de toutes les races qui pullulent dans l’Orient asiatique, elle fait un commerce de transit qui atteignait presque, en 1899, un milliard deux cents millions de francs. Elle est, en face du Siam, ce qu’est Hong-Kong ou Shangaï vis-à-vis de la Chine ; elle est sa métropole commerciale, elle l’approvisionne d’articles européens. Bangkok, au point de vue économique, est une dépendance de Singapour. C’est ainsi que, sans secousses, sans opérations militaires, par l’ascendant de sa supériorité commerciale, la Grande-Bretagne exerce une influence prépondérante sur les destinées du royaume de Siam.

Toute d’influence pacifique et de prépondérance commerciale à Bangkok et dans le bassin du Ménam, la politique britannique est plus envahissante et plus directement dominatrice dans la presqu’île de Malacca. Singapour et les Colonies du Détroit (Strait’s-Settlements) lui ont servi de « base d’opérations » pour absorber les sultanats malais du Sud et entamer les principautés vassales du Siam. Djohore, à l’extrémité méridionale de la péninsule, est gouverné par un sultan protégé de l’Angleterre. La petite capitale, Djohore-Baroe, occupe, sur le détroit, en face de l’île de Singapour, une position excellente ; elle est le futur terminus de la ligne, déjà amorcée, qui doit relier Singapour aux Indes.

« Les quatre pays malais qui vivent sous le drapeau de la Grande-Bretagne, » c’est la traduction du nom arabe des quatre États fédérés que l’Angleterre gouverne et où elle a créé un modèle d’administration coloniale bienfaisante et peu coûteuse : Perak, Selangor, Nègri-Sembilan sont sur la côte occidentale ; Pahang est baigné par le golfe de Siam. Chacun de ces petits pays a conservé son autonomie, mais chaque sultan est assisté d’un résident britannique et d’un conseil d’Etat ; un résident général, dont le palais s’élève à Kouala-Loumpour, est chargé de gérer les intérêts communs de la fédération. Grâce à cette organisation sage, l’heureuse fédération malaise pourvoit à toutes ses dépenses, elle n’a pas de dettes et elle a construit, en quelques années, des routes et 585 kilomètres de voies ferrées qui donnent un rendement de 9 pour 100 du capital engagé. Les lignes partent des « établissemens du détroit, » pénètrent dans