Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 18.djvu/683

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Été, car nul que moi, dont l’ivresse est l’ouvrage
De ton jour radieux
Qui d’une Nymphe nue anima le feuillage,
Ne pourra dire mieux


Le goût de ton air pur et nourri dès l’aurore
De la flamme des fleurs
Dont la brise de loin, en un parfum sonore,
Nous apporte l’ardeur.

Le fruit de tes vergers, ni l’eau de tes fontaines
Ne seront pas vantés
Par personne et selon des paroles moins vaines
Mieux que par moi, Été !

Ni tes matins, ni tes midis, ni l’ombre lente
Qui s’allonge, le soir.
Du grand pin, empourpré comme une torche ardente.
Où je reviens m’asseoir ;

Et, si j’ai mal chanté ta gloire, qu’on me lie
Au tronc, bien attaché,
Comme on lia jadis à l’arbre de Phrygie
Marsyas écorché.

Et toi-même, cher Dieu qu’a salué ma bouche,
Sois le rouge bourreau
Qui par les flèches d’or de ton soleil farouche
Déchirera ma peau !


STROPHES


O toi, dont l’ombre encore en ces lieux semble nue
Tant à jamais ta chair vit dans mon souvenir,
J’ornerai ton jardin d’une seule statue
Debout et qui sera celle de mon Désir,
Et ses bras chercheront encor ton ombre nue...