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ont pour ainsi dire déversée à la fois dans le Pé-tchi-li, comme un fleuve débordé, il a pu s’en trouver d’assez lâches et d’assez misérables pour consommer contre d’inoffensifs habitans ou contre de faibles êtres quelques-uns de ces épouvantables forfaits qui relèveraient du bagne ou de la potence. Des gens qui se sont donné pour tâche de chercher à détruire, dans l’armée, l’esprit de discipline, et d’y semer la désaffection des chefs, travaillant ainsi, sciemment ou non, à préparer ces défaites dont ils nous dépeignent, dans toute leur atrocité, les terribles conséquences, se sont ingéniés à recueillir, pour s’en servir comme d’une arme contre une institution à laquelle la France doit la plus belle part de son prestige, de sa prospérité et de sa gloire, le récit de crimes de toute nature, attribués aux divers corps expéditionnaires, — pour la plupart, élucubrations fantaisistes de romanciers, ou propos de Tartarins de chambrées, qu’ils se sont plu à vulgariser en en amplifiant encore l’horreur. Ce qu’ils n’ajoutent point, c’est que de semblables infamies, si elles se sont réellement produites, n’ont pu être le fait que de très rares exceptions et n’ont été perpétrées que dans l’ombre, loin des regards des officiers comme aussi des autres soldats ; qu’elles ne sont point imputables à des Français, auxquels il est arrivé, au contraire, en maintes circonstances, agissant sans ordres, sous l’impulsion spontanée des sentimens de générosité inhérens à notre race, de chasser, de leurs cantonnemens, des suspects, errant en quête de pillage ou surpris en flagrant délit de brutalité envers des indigènes ; et qu’enfin, aucun cas ne pourrait être cité où un de ces actes flétrissans ait pu être accompli à la connaissance ou sous les yeux d’un gradé, sans que son énergique intervention se soit interposée en faveur de ceux qui en étaient victimes, et qu’une répression rigoureuse s’en soit suivie.

Les auteurs des incendies qui ont dévoré des villes entières, de ces rapines et de ces crimes qui ont terrorisé les populations et soulevé tant de justes réprobations, il faut les chercher dans la tourbe des Chinois dont regorgent les grandes cités : escarpes, malandrins, malfaiteurs et vagabonds de tout acabit, faux mendians, coolies fuyant le travail, engeance de tous les temps et de tous les pays, pour lesquels toute occasion est bonne d’assouvir leurs passions et de donner libre cours à leurs instincts de rapine aux dépens des étrangers comme de leurs compatriotes. Ce sont eux qui, les premiers, accoururent pour former la clientèle