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ou l’entretien des bâtimens du ministère de l’Instruction publique. Faut-il donc croire qu’il y avait 5 millions de reste, ou de trop dans ce crédit ? Non, le crédit n’était pas excessif ; mais M. Combes aime à présenter ainsi les choses pour pouvoir conclure que l’exécution de son projet de loi n’augmentera pas d’un centime les dépenses de l’État. Quant aux communes, une note officieuse qui a paru dans les journaux dit expressément que le surcroît de charge qui leur incombera ne regarde qu’elles, et qu’il n’y a pas lieu de s’en occuper.

Il est à peu près certain que le projet de loi dont nous venons de parler sera voté pendant la session ordinaire de 1904 : nous ne voyons pas, étant donné le vent qui souffle, ce qui pourrait empêcher ce dénouement soit à la Chambre, soit au Sénat. Cela permettra au ministère de passer l’année, à moins d’accidens imprévus, et d’atteindre la session d’automne où l’on aura un nouveau budget à discuter. Et ensuite ? Ensuite, comme nous l’avons dit en commençant, une matière législative très abondante restera encore à la disposition de M. Combes. D’abord, on pourra reprendre l’amendement Girard qui interdit l’enseignement aux prêtres séculiers. Rien ne sera plus logique. Les moines ont été proscrits parce qu’ils faisaient les vœux d’obéissance et de célibat ; les prêtres ordinaires font au moins le second, et dès lors on nous a fort bien expliqué qu’ils s’étaient mis eux-mêmes en dehors de l’humanité. Qu’y a-t-il d’excessif à interdire l’enseignement à des gens qui sont en dehors de l’humanité ? Rien, n’est-ce pas ? C’est même les traiter avec ménagement. Et d’ailleurs ne sont-ils pas animés du même esprit que les moines ? Ne propagent-ils pas les mêmes superstitions ? N’est-il pas aussi dangereux de leur laisser mettre la main sur la tête des enfans, qui contient un cerveau encore si malléable ? Mais on s’apercevra peut-être que les prêtres séculiers ne s’adonnent à l’enseignement que par exception, et qu’en le leur interdisant on donnerait un coup d’épée dans l’eau. Nous souhaitons que cela les sauve de l’interdiction. On aura d’ailleurs bien d’autres choses à faire, soit qu’on veuille préparer, ce qui ne peut avoir lieu que pas à pas, la suppression des congrégations charitables, soit qu’on préfère s’en prendre tout de suite à l’énorme problème de la séparation de l’Église et de l’État.

Il s’est fait à ce sujet un progrès rapide dans les idées de beaucoup de personnes ; mais ce progrès ne s’est pas encore manifesté d’une manière très sensible dans les majorités parlementaires. Celle de la Chambre des députés est troublée, elle hésite, elle tâtonne ; néanmoins, toutes les fois qu’elle a été amenée à se prononcer nettement, elle la fait