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et d’en tirer de belles copies tant d’architectures que de peintures et sculptures. » Pour l’architecture, « excepté le Panthéon ou Rotonde, le Colysée et quelques colonnes (sic), » il ne voit « rien de considérable de l’Antiquité qui puisse instruire les estudians » et, parmi les monumens modernes, à peine est-il d’avis que « la grande église Saint-Pierre et peu d’autres peuvent fournir à nos voyageurs prévenus de quoy se récrier. »

Toujours courtisan, Poërson, qui, plus que jamais, a besoin des bonnes grâces du surintendant, ne néglige pas d’ajouter que « les excélans et admirables ouvrages dont Mansart a orné la France sont des moyens plus sures pour faire de bons architectes que tout ce que l’on voit dans Rome. » Quant aux chefs-d’œuvre de la peinture et de la sculpture, que renferme la Ville Eternelle, Poërson affecte de ne leur attribuer guère plus d’importance qu’à ceux de l’architecture. « A l’égard de la peinture, dit-il, les lieux où sont les belles choses qui ont acquis tant de réputation à cette Ville sont quazi toutes ruinées et de plus fermées aux estudians, de manière qu’il y a peu de fruit à en espérer et beaucoup à craindre de l’oisiveté que les jeunes gens contractent aisément en ce païs. Et, quant à la sculpture, ce qui est moderne donne assez générallement dans un goût faux et bizarre. Pour les antiques, ayant les figures mouliez en France, il n’est pas absolument nécessaire de venir icy. La preuve est que, depuis que je suis à Rome, je n’ay veu ni Italiens ni aucun estranger copier les marbres. L’on se contente de dessiner ou modeler d’après les piastres, dans lesquelles on trouve plus de facilitez. Toutes ces considérations, jointes à ce que vous pourriez, monseigneur, employer ces sommes plus utilement en France, me forcent de prendre la liberté de vous remontrer très respectueusement que le Roy pourrait esviter cette dépense. »

On en était là ; et Poërson semblait sur le point de quitter Rome et de fermer l’Académie, lorsque, Mansart étant mort subitement le 11 mai 1708, le marquis d’Antin brigua sa succession et l’obtint, encore qu’il y parût peu préparé par le métier des armes qu’il avait longtemps suivi, sans grand bonheur.


III

Quoiqu’il se piquât « de s’être toujours mêlé de jardinage et d’avoir du goût pour les maisons, » il est probable que tel n’était