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portraits se termine par ceux de Ferdinand de Lesseps et de ses principaux collaborateurs ; elle commence à ceux de Séti Ier et de Rhamsès II Meïamoun, car nous avons l’image authentique de ces glorieux Pharaons : non pas seulement d’après les peintures des temples trente ou quarante fois séculaires, mais, ce qui semble paradoxal, d’après leur photographie. Arrachées par M. Maspéro à l’ombre jusqu’alors inviolée de leurs nécropoles royales, leurs momies ont posé devant l’objectif de nos appareils[1].


I

L’histoire du Canal, pendant de longs siècles, fut surtout l’histoire d’une idée. C’est seulement à partir de la première intervention de Lesseps qu’elle est devenue l’histoire d’un fait. Ce fait est entièrement nouveau, car le Canal, tel qu’il a été conçu et exécuté par Lesseps, n’a presque rien de commun avec celui qu’ébauchèrent les Pharaons et qui, avec des intermittences, paraît avoir été pratiqué jusqu’à la fin du VIIIe siècle de notre ère. Il importe de bien établir en quoi consiste la différence entre les deux entreprises.

Le Canal de Ferdinand de Lesseps perce l’isthme de part en part. Il ne forme qu’une ligne droite, de Port-Saïd, sur la Méditerranée, à Port-Tewfîk, au sud de la vieille ville de Suez, sur la Mer-Rouge. Il fait directement communiquer les deux mers et les deux océans dont elles sont tributaires. Il est bien un Canal interocéanique. Rien de pareil dans le canal des Pharaons, dans cette œuvre qu’Hérodote attribuait à Néchao (Niko II, 26e dynastie), mais dont les recherches d’Ebers et de Maspéro reportent l’honneur à Séti Ier et à son fils Rhamsès II Meïamoun, (19e dynastie). Un bas-relief du temple de Karnak nous montre

  1. Signalons, à la fin du tome II, une Bibliographie qui ne comprend pas moins de 1 499 numéros, où sont indiqués, par ordre chronologique, tous les livres, brochures, rapports, cartes, articles de revues qui forment la vaste littérature de la question de l’Isthme et du Canal, de l’année 1766 jusqu’à nos jours.
    Quelques-unes des premières et des plus importantes études ont paru dans la Revue des Deux Mondes. Il nous suffira de relever les articles les plus anciens : de Letronne, 15 juillet 1841, l’isthme de Suez : le canal de jonction sous les Grecs, les Romains et les Arabes ; Michel Chevalier, 1er janvier 1844, Projets de percement de l’Isthme : l’Isthme de Panama et l’Isthme de Suez ; J.-J. Baude, 15 mars 1835 ; Paulin Talabot, 1er mai 1855 ; Alexis et Emile Barrault, 1er janvier 1856, etc.