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Quelle que soit la valeur des dispositions, elles deviennent inefficaces si le mouvement ne leur donne pas la vie.

À cette néfaste époque, notre armée croyait à la force des positions.

Elle avait oublié ce principe si essentiellement français : « Faire la guerre, c’est attaquer. » Partout on la vit se fixer, se cramponner au terrain. Elle attendait l’attaque, et c’est là qu'il faut chercher la cause essentielle de la défaite.

A l’heure actuelle, quelques officiers croient encore à l’importance des positions.

Bien plus, ils considèrent l’augmentation de la puissance de destruction des armes, qui, en réalité, est essentiellement favorable à l’offensive, comme donnant désormais aux positions une valeur plus grande que par le passé.

Il est clair que, dans l’ensemble du champ de bataille, les zones découvertes, et par conséquent passives, pourront être tenues par des effectifs moindres qu’autrefois, et cela permettra d’affecter des forces plus considérables à l’offensive, menée dans les zones actives, constituées par les parties coupées et couvertes du terrain.

Mais il ne faut jamais perdre de vue que le mouvement est la condition essentielle du succès. Dans l’avenir, son importance sera telle, que de faibles effectifs bien conduits pourront avoir raison de forces plus considérables, mais moins manœuvrières.

Les partisans de la tactique des attaques décisives du règlement de 1901 partagent bien cette manière de voir, mais ils tiennent à l’appliquer à des masses.

Ils en appellent au mot de Napoléon : « Si l’adversaire est percé sur un point, tout le reste devient inutile et tombe. »

D’après eux, telle est la formule de la bataille de rupture et ils en veulent conclure que le procédé favori de l’Empereur résidait dans cette forme de tactique. C’est encore là une erreur qu’il importe de rectifier.

L’attaque de Napoléon est généralement préparée par un mouvement tournant de grande envergure, destiné à déranger les dispositions de l’ennemi, à troubler son ordre de bataille, et à le prendre à revers dans la crise finale. Exemples :

Castiglione (5 août 1796). — L’arrivée de la division Sérurier (commandée par Fiorella) en arrière de la gauche de Wurmser lui fait retirer brusquement son aile gauche, et toute