Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 19.djvu/910

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

enseignante à Londres. Un des plus actifs, parmi les zélés de la première heure, fut M. Fry, homme très éclairé et l’un des juges des Cours supérieures. L’attention était éveillée et l’idée fut discutée dans les journaux par ceux qui avaient quelque autorité en pédagogie. Elle était assez mûre, déjà, pour motiver la nomination d’une Commission royale (2 mai 1888), qui étudia la question et remit son rapport le 29 avril de l’année suivante. Le Sénat de l’Université s’empara alors de ce projet et rédigea un plan de reconstitution qui fut soumis à la Convocation et que cette assemblée refusa d’endosser. Or, si l’on a bien voulu suivre les explications données plus haut sur le caractère et la composition de l’ancienne Université, c’est le corps des gradués qui en formait l’élément essentiel. Impossible de se passer de leur assentiment. Le diplôme dont ils étaient porteurs était, ai-je dit, en beaucoup de cas, leur unique fortune. J’ajoute que ces diplômes avaient pris une réelle valeur, à raison de la sévérité, toujours croissante, des examens. Les membres de la Convocation étaient persuadés que le niveau de ces examens baisserait, le jour où les degrés conférés par la nouvelle Université ne seraient plus que des certificats d’assiduité et de bonne conduite, délivrés par les professeurs à leurs élèves ordinaires. D’autre part, il y avait, dans le monde scolaire et pédagogique d’alors, un vif mouvement de protestation et de réaction contre l’abus des examens. Pour quelles raisons ? Mes lecteurs n’ont qu’à se rappeler ce qu’ils ont lu à ce sujet dans nos journaux et nos revues, car ce vent a soufflé et souffle encore chez nous. La réaction contre les examens était d’autant plus puissante en Angleterre que l’esprit anglais est opposé, par nature, à ce mode de sélection et n’a reçu qu’avec méfiance cet emprunt fait aux nations continentales. Les succès remportés dans les examens et les concours de l’Université de Londres par les Cramming Shops (usines à bachot) semblaient à beaucoup de gens un argument sans réplique contre cette institution. Les professeurs des véritables collèges d’enseignement supérieur étaient comme paralysés par ces programmes dont la pensée hantait sans relâche l’esprit de leurs étudians. Le maître s’en écartait-il ? on désertait ses cours. S’y soumettait-il ? son enseignement perdait toute indépendance, toute largeur, toute originalité.

Ainsi deux tendances contradictoires se tenaient en échec et un temps d’arrêt se produisit. C’est alors que les autorités de