Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 21.djvu/339

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sont reconnus délicats s’ils appartiennent à une famille qui vote bien. Et cela aussi influe sur la mortalité désolante de nos soldats.

Dans ces conditions, que restera-t-il de ces vœux platoniques et de ces efforts stériles, qui ne vont même pas, dans le projet d’aujourd’hui, jusqu’à une distinction absolue, comme en Allemagne, entre le combattant et le non-combattant ?

Loin de cela, et par une contradiction inexplicable avec les vœux cités plus haut, la commission de l’armée projette mieux encore que ce système pourri. Elle prévoit, avant le conseil de révision, une « Commission d’examen préparatoire » composée du sous-préfet, d’un officier de recrutement et d’un médecin, pour « préparer les opérations du conseil de révision et noter les conscrits au point de vue de leurs aptitudes, » de manière à « ne pas incorporer des hommes sur l’état physique desquels pourrait subsister le moindre doute. » En réalité, c’est une commission politique précédant la commission militaire où quelquefois l’honnêteté d’un médecin gênait le préfet : c’est préparer l’armée politicienne de Tammany-Hall.

Pendant ces dernières années, en moins de quatre ans, nous perdions en moyenne 30 000 hommes, ou la valeur d’un corps d’armée d’hommes d’encadrement.

Que perdrons-nous avec la nouvelle loi ? Le rapport est muet sur cette question redoutable, il néglige volontairement ce fait capital d’où devrait se déduire l’originalité nécessaire d’une loi française ; et son silence souligne le caractère politique d’une loi isolée, limitée à la question du recrutement, c’est-à-dire du temps de service.

Que perdrons-nous en outre, si les mœurs que nous avons dénoncées, loin d’être réprimées, sont favorisées par la nouvelle loi ?

Si ces signes de décadence devaient se multiplier ou seulement subsister, ils rendraient bien inutile, pour l’étranger, une guerre contre la France, qui semblerait avoir pris à tâche de se détruire elle-même !


II

La notion de ressources financières ou numériques si limitées risque de faire paraît e démesurées, et comme au-dessus de