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Que n’en est-il de même pour le ministère des Colonies ? Là, une autre visite des locaux, faite dans les mêmes conditions, démontrait que, de ce côté, les menaces d’incendie sont constantes et qu’aucune précaution n’a été prise pour les conjurer. Dans les bureaux, séparés par de légères cloisons en sapin, des tuyaux de poêle traversent ces parois très inflammables, et le danger est tel pour les employés eux-mêmes qu’une cloche d’alarme a été installée afin de leur donner le signal de la fuite, en cas d’alerte. Et cependant, ni les avertissemens de la réalité sous forme de plusieurs commencemens d’incendie, ni les protestations réitérées de toute la presse, ni les instances de l’administration des Beaux-Arts, du directeur et de l’architecte du Louvre, ni celles du Conseil des musées n’ont cessé de se produire contre un état de choses que condamnent absolument des décrets rendus et des lois votées à cet égard. On sait qu’après la Commune, et avant la réédification de l’Hôtel de Ville, la Préfecture de la Seine et ses bureaux s’étaient installés au pavillon de Flore et dans les locaux de la grande galerie qui relie les Tuileries au Louvre. Le danger créé par ce voisinage avait dès lors attiré l’attention et, grâce au mouvement d’opinion qui s’était produit, dès que la chose fut possible, les bureaux et bientôt le préfet lui-même quittaient les Tuileries et se réinstallaient à l’Hôtel de Ville. Pour prévenir le retour d’une situation pareille, le 26 juin 1883, M. Jules Ferry, ministre de l’Instruction publique, faisait prendre par le président de la République un décret dont l’article premier était ainsi conçu : « Sont affectés au ministère de l’Instruction publique (service des musées nationaux) tous les locaux des palais du Louvre et des Tuileries occupés actuellement par les services de la Ville de Paris. » Malgré les termes impératifs de ce décret, le service des musées nationaux n’a jamais été mis en possession effective des locaux qui lui étaient ainsi formellement attribués. Si l’administration des Beaux-Arts y avait, à ce moment, fait une installation quelconque, on n’eût probablement pas songé à les lui enlever. Comme ils étaient restés inoccupés, une loi du 20 mars 1894 ayant créé le ministère des Colonies, en dépit du décret de 1883, ce ministère en quête d’un asile s’y installa. On ne parlait, il est vrai, que d’une installation provisoire ; mais, une fois de plus, nous devions apprendre ce que dure chez nous le provisoire.

Dès sa fondation ordonnée pur la loi du 16 avril 1895, le